Forgiveness Rock Record

Chronique

En ces temps de gratification instantanée, cinq ans c’est un peu long tout de même... Le collectif de Toronto l’aura donc peaufiné ce successeur au génial et éponyme album Broken Social Scene, fascinant assemblage bordélique qui liait Pavement à Tortoise, Sigur Rós aux Flaming Lips, le tout auréolé d’un esprit de fanfare à la Arcade Fire... Toujours piloté par les poilus Kevin Drew et Brendan Canning, BSS poursuit ici sa saga indé symphonique avec une verve intacte et une richesse déboussolante. La base de Forgiveness Rock Record a cette fois été conçue à (seulement) six, les nombreux habituels invités (Feist, John McEntire...) se limitant logiquement à leur rôle d’invités. Un resserrage des boulons pas pour autant synonyme de réduction de focale, BSS restant une orgie de sons et de sens. Viscéralement plus pop et rock’n’roll que d’autres grands brouilleurs de pistes comme Animal Collective, les Canadiens ne surpassent pourtant ni Broken Social Scene, ni You Forgot It In People, leur chef d’œuvre de 2002. Le temps aidera peut-être à digérer la tachycardie stylistique et surtout qualitative de Forgiveness Rock Record, mais les écarts d’écriture sont trop violents pour embrasser cet album dans sa globalité. Et les moments de grâce totale (Meet Me In The Basement ou World Sick) fricotent avec d’anecdotiques et gentillets interludes (Ungrateful Little Father). BSS reste tout de même une aventure majeure. Un groupe au dessus du lot. Qui sait construire des murailles de guitares quasi-sérielles. Peindre au pochoir des nuages harmoniques fous. Pulvériser ses gouttelettes d’electro avec parcimonie (du pur Tortoise). Et surtout, sculpter des mélodies à tomber par terre. Pour 6875 autres groupes, Forgiveness Rock Record eut été un grand disque. Pour BSS, Forgiveness Rock Record ressemble à une récréation rêveuse... © MZ