Lee Konitz
Seuls les vrais savaient que Lee Konitz comptait parmi les derniers géants de l’histoire du jazz. Pas les petits maitres, non, les vrais géants ! Ces empêcheurs de tourner en rond, capables de secouer le jazz cool comme la scène free…
Le 15 avril 2020, le saxophoniste de Chicago a été emporté par le Covid-19. Malgré le temps qui passait et une vivacité moins évidente, Konitz possédait toujours ce son unique, cet alto qui proposa très tôt une alternative à la révolution be-bop de Charlie Parker. Restait à se laisser porter par ses phrases fluides et profondes, comme burinées par les années et toujours aussi bouleversantes. Par ces narrations de celui qui avait tout vu, tout entendu, mais n’usait jamais de ses faits d’arme ou de ses médailles. Être aussi frais ces dernières années, aussi inspiré et jamais blasé lorsqu’on a croisé le fer avec les Miles Davis, Lennie Tristano, Bill Evans, Gerry Mulligan, Stan Kenton, Dave Brubeck, Ornette Coleman, Charles Mingus et autres Elvin Jones, n’était pas à la portée de tout le monde.
Ce poète discret et d’une grande modestie avait été de toutes les révolutions : bop, cool, post bop, free… Sa vision résidait surtout dans la relecture, la révision et la recréation infinies des standards, plutôt que dans la composition pure. Élève du grand pianiste Lennie Tristano aux côtés duquel il apprend avant tout la nécessité d’être totalement libre, Lee Konitz balayera d’un revers de main les grilles harmoniques préétablies. Il sera de la partie lorsque Miles Davis enregistre le révolutionnaire Birth of the Cool arrangé par Gil Evans, considéré comme une sorte d’antidote épurée au be-bop exalté.
Hors des courants et loin des modes, il construira une vaste discographie avec les meilleurs musiciens possibles comme Martial Solal, Elvin Jones, Warne Marsh ou Michel Petrucciani. Ces dernières années, d’illustres labels comme ECM et Impulse !, conscients sans doute qu’il était l’un des derniers génies vivants du saxophone avec Wayne Shorter et Sonny Rollins, lui avaient ouvert leurs portes. © Marc Zisman/Qobuz
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