The Shadow I Remember

Chronique

Retour aux années 90, aux t-shirts sales et déchirés, aux chemises de bucherons fripées et aux planches de skate usées jusqu’au dernier roulement à bille… Les Cloud Nothings cultivent depuis une dizaine d’années cet indie rock qui refuse de mourir, des guitares rageuses et rugueuses, une batterie qui s’emballe et une voix infusée d’angoisse et de colère nonchalante. Cultivant une notoriété grandissante, acquise surtout sur Bandcamp, puis leur label, Carpark. Emmené par Dylan Baldi, le groupe lo-fi originaire de Cleveland, Ohio, revient avec The Shadow I Remember, album produit par une pointure du genre, Steve Albini, incontournable de la scène rock ayant travaillé avec des milliers de groupes et aux manettes de quelques chef-d’oeuvres tels le In Utero de Nirvana, Pod des Breeders, Surfer Rosa des Pixies ou le Rid of Me de PJ Harvey. Pour Cloud Nothings, Albini avait déjà produit en 2012 Attack On Memory, l’album qui fit passer le groupe à une autre échelle. Quelques opus de plus et près d’une dizaine d’années passées, et revoilà donc le producteur émérite pour une seconde aventure. Sur The Shadow I Remember on retrouve la fougue de Baldi, surfant nerveusement sur une vague de guitares saturées à souhait. Oslo, Nothing Without You, The Spirit Of, Only Light… les mélodies mélancoliques adolescentes et attachantes se succèdent et rappelleront à certains cette même sensation à écouter ou réécouter les grands frères de Cloud Nothings, les vétérans Dinosaur Jr, Sonic Youth ou Sebadoh… Et le premier single, Am I Something, peut aussi faire penser à Hole ou les Breeders, dans la façon dont Baldi prend plaisir à trainer sur les mots en cherchant vainement à savoir s’il est bon ou pas, répétant sans fin « Am I something good… ».The Shadow I Remember se finit en beauté par un The Room It Was bruyant à souhait que Thurston Moore n’aurait sans doute pas renié… Comme quoi, comme le skate, le grunge est toujours là et n’est pas prêt à rendre les armes. © Yan Céh/Qobuz