Valentin Silvestrov: Widmung & Postludium for Piano & Orchestra

Chronique

Exilé à Berlin depuis le début de la guerre russe en Ukraine en 2022, Valentin Silvestrov est un des plus grands compositeurs ukrainiens. Né à Kiev (alors en URSS) en 1937, il fait partie du petit cercle des compositeurs d’avant-garde de sa ville natale réunis autour de la figure de Leonid Grabovski. Avec les années, sa musique prend un tour de plus en plus expressif dans une perspective tonale dominée par un retour au passé particulièrement nostalgique faisant de lui un des principaux représentants du post-modernisme. Enregistré en 2022 dans le Lithuanian National Philharmonic Hall de Vilnius, ce deuxième album consacré à Silvestrov par Naxos est consacré à Widmung, une vaste symphonie pour violon et orchestre composée au début des années 1990. Ce n’est pas la musique de Mort à Venise, mais celle de Mort à Kiev s’est exclamé Gidon Kremer, le dédicataire de l’oeuvre, en réécoutant son propre enregistrement. Dans cet album, le violoniste Janusz Wawrowski en restitue à la fois la gravité et le romantisme douloureux, comme si le compositeur avait pressenti la catastrophe actuelle. Le Postludium pour piano et orchestre, interprété ici par Jurgis Karnavičius, date de 1984 et fait partie d’une série d’œuvres conçues comme une collection d’échos au propre vécu de Silvestrov. Cette oeuvre à l’instrumentation raffinée, dans laquelle le piano soliste est comme imbriqué à la matière orchestrale, représente le basculement d’un dodécaphonisme cédant peu à peu le pas au retour des structures tonales. L’harmonie se cale alors sur un mi b qui va initier une cadence pour le piano tel un mini récital dans lequel les cigales bavardent doucement dans une atmosphère crépusculaire jusqu’à un mi naturel apaisant amenant la musique au silence dans une contemplation fascinante. © François Hudry/Qobuz