Epistola

Chronique

De la morna capverdienne qui parfumait ses premiers albums, dans lesquels perçaient déjà d'autres affinités musicales, Carmen Souza a fait le grand saut vers un jazz protéiforme où se téléscopaient sur son album précédent, Kachupada (2012), le swing, le scat, et les rythmes afro-cubains, dans un élan dynamique et savoureux. Une belle réussite pour le jazz vocal qui reprenait des couleurs après tant d'exerices scolaires de bossa nova délavée.

Outre un charme irrésistible porté par une voix élastique, tour à tour grave, sensuelle ou mutine, comme dans ce « Cap Verdean Blues » qui ouvre Epistola, la chanteuse possède une énergie intérieure peu commune, qu'elle allie à des qualités de compositrice et de musicienne (pianiste et guitariste). Pour l'accompagner dans cette démarche d'ouverture au jazz, elle bénéficie d'un allié fidèle hors-pair en la personne du co-compositeur, bassiste et percussionniste Theo Pascal, accessoirement mentor depuis les débuts, co-crédité pour la première fois.

Enregistré entre Londres, Lisbonne et New York, Epistola se veut une lettre ouverte en forme de déclaration d'amour au jazz mondialisé, enrichi par les dialogues improvisés qu'il a noué au fil du temps avec les rythmes latins. Ainsi en résonne-t-il des échos particulièrement réjouissants dans la suite « Afro Monk », où plane les ombres du pianiste géant, de John Coltrane et de Charlie Mingus, tel une jam session de rêve au paradis.

Parti sur un chant africain, « Kutequatekessa Quamundos » descend rapidement dans une cave enfumée de la « Big Apple » avec le saxophone de Craig Yaremko, au chorus déjanté sur « WPFL » et à la clarinette sur « Twenty Choices » et « Thursday ». Le pianiste Matt King et les batteurs Shane Forbes et Zoe Pascal complètent une formation qui déménage. En excellente compagnie, Carmen Souza étoffe encore son style déjà pimenté de nouvelles saveurs hard bop, pour le régal des amateurs.

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