Abysses

Chronique

Imaginez le verbe d'un Abd Al Malik allié à la puissance d'un Booba. Impossible, improbable, eh non c'est bien réel et ce phénomène a pour nom Scylla. Déjà aperçu sur scène ou avec ses deux premiers EP, Scylla est aussi une pièce maîtresse du collectif Inglourious Bastardz. Une fois les présentations faites, il reste à s'incliner devant Abysses qui nous entraîne au plus profond d'un rap d'une rare densité.

La force vocale et l'habileté d'écriture de Scylla ne seraient rien sans des musiques à la hauteur. Pas de frustration de ce point de vue, Abysses répond présent et fait de chacun de ses beats un coup porté au bon endroit. Abysses ce sont quinze chansons qui prennent à la gorge, nouent les tripes, et laissent pantelant et épuisé au bord du rivage.

La plongée est brutale avec « Abysses » et sa lente intro qui laisse soudain exploser le flow survitaminé de Scylla. Déjà présent en 2012 sur l'EP du même nom, « Second Souffle » joue comme souvent chez Scylla sur le mélange entre sonorités classiques (cordes, piano) et l'agressivité des breaks venus des machines. Le procédé n'est pas nouveau, mais il est tellement bien utilisé par Scylla qu'il prend la tournure d'une signature.

« Le Salaire de la peur » est aussi flippant que son titre l'indique, il n'existe pas de porte de sortie et les rimes pleuvent de toutes parts. Au niveau des participations, « Erreurs génétiques » avec Furax est d'une violence contenue qui donne froid dans le dos, tandis qu'avec Saké il joue sur un registre plus positif pour « La Sagesse d'un fou » et son histoire de rédemption. Album plutôt sombre, Abysses propose quelques respirations plus littéraires comme « La Logique d'une contradiction » et « Plume originelle ».

Avant d'aborder Abysses, il ne faut pas oublier sa réserve d'oxygène et ne pas brûler les paliers lors de la remontée. A moins de vouloir rester scotché au fond d'un disque qui sait ce qu'ivresse des profondeurs veut dire.

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