Uuno Klami: Cheremissian Fantasy, Sea Pictures, Kalevala Suite

Chronique

À force de réduire le terme « musique finlandaise » au seul Sibelius, on en oublie que le pays a donné naissance à d’autres compositeurs de grand talent, dont Uuno Klami (1900 – 1961), un musicien peut-être moins intimement lié à son pays que ne le fut son ami et aîné Sibelius. Chez Klami, par exemple, on perçoit clairement l’influence de la musique française, Ravel et Debussy en tête – c’est que le jeune homme étudia en partie à Vienne et à Paris ; son premier concerto pour piano s’appelle d’ailleurs Une nuit à Montmartre ! Autre influence notable, c’est celle de Stravinski et aussi, plus singulière, des grands Espagnols du début du XXe siècle. Voici un superbe florilège de ses œuvres orchestrales, à commencer par la Fantaisie Tchéremissienne (ou Kérémisienne, selon les orthographies), du nom d’une peuplade finno-ougrienne présente à l’Est de la Finlande et jusqu’à la Volga, et composée pour violoncelle et orchestre. Klami emprunte des tournures que l’on peut aisément attribuer à ces ethnies qui, de nos jours encore, pratiquent majoritairement une religion païenne. Suivent les Paysages marins de 1932, et ensuite la célèbre Suite Kalevala écrite de 1933 à 1943, une sorte de Sacre du printemps finnois avec sa propre conception de la création de l’Humanité selon l’épopée éponyme assemblée au XIXe siècle par le folkloriste Elias Lönnrot, d’après la tradition orale. Klami y développe un langage néo-primitif d’une force inouïe. Tout cela nous est donné par deux chefs de tout premier ordre, à commencer par Jorma Panula, qui, entre la fin des années 1960 et le début des années 1970, réalisa tous ses enregistrements d’importance, notamment pour Decca (Sibelius, Symphonie No. 5, en 1969, passé sous l’égide de Finlandia quelques années plus tard), et dirige ici la Kalevala-Suite, gravure légendaire, prisée des discophiles, et on comprend pourquoi ! (il suffit d’entendre « Terhenniemi » et de succomber à l’élégance presque érotique qu’il tire de ses musiciens). Quant à Leif Segerstam, infatigable défenseur de la cause finnoise, à la tête de l’Orchestre de la Radio finlandaise en grande forme, il offre de ses Sea Pictures une vision tout aussi colorée. © SM/Qobuz