Bruckner: Symphony No. 3

Chronique

Tous ceux qui ont eu la chance, dans les quinze dernières années, d’entendre Herbert Blomstedt en concert diriger une symphonie de Bruckner savent qu’ils ont vécu des expériences humaines, artistiques, sensorielles, absolument inoubliables. Son retour à Paris, en mars 2008, par exemple, transcenda absolument l’Orchestre de Paris pour une Cinquième d’anthologie, prélude à de nouvelles invitations, répétées, dont Bruckner sera le compagnon fidèle.

Ici, c’est avec le Berliner Philharmoniker que le chef américano-suédois éblouira dans la Troisième, choisie dans sa première version, curieuse et envoûtante, de 1873. Blomstedt pense long, avec un sens de l’articulation et de la tension impressionnantes. Cette partition, habituellement si réfractaire, se distingue pourtant par son geste constamment fluide et naturel, aux phrasés incroyablement sentis ; dans le si bel Adagio (Feierlich), le lyrisme tendre de Schubert et le désespoir hédoniste d’un Wagner s’équilibrent avec une rare acuité, comme amoureusement.

Pourquoi la musique devient-elle avec certains absolument évidente ? Personne ne peut réellement le savoir. Cependant, Herbert Blomstedt, ici, accomplit assurément un miracle. Prenez le temps de vous y lover avant de parcourir à nouveau les divers témoignages du chef dans Bruckner, depuis ses Denon avec la Staatskapelle de Dresde à son intégrale avec le Gewandhaus de Leipzig, en passant par ses plus méconnues et pourtant sompteuses gravures avec l'Orchestre symphonique de San Francisco. © Pierre-Yves Lascar/Qobuz