Another Side

Chronique

Oubliez James Brown, Sly Stone et George Clinton car les vrais maîtres du funk, c’était eux : les Meters, le gang le plus groovy de New Orleans dont la musique a été samplée à foison par quasiment tous les rappeurs de la terre. Au cœur de cette centrale nucléaire soul, Leo Nocentelli, guitariste virtuose et sous-estimé, dont le jeu minimaliste portait à lui seul les tubesques chansons du groupe comme Cissy Strut ou Hey Pocky A–Way. Avant l’aventure Meters, Nocentelli s’était fait remarquer pour sa technique : à 16 ans, il assurait derrière Otis Redding et enchaîna vite les sessions pour Lee Dorsey, les Supremes et les Temptations… En 1971, Leo Nocentelli débarque au Jazz City Studio de Cosimo Matassa pour enregistrer quelques-unes de ses propres compositions. Ces démos, jamais publiées, finissent au placard, avant de refaire surface 50 ans plus tard pour sortir pour la première fois grâce à l’excellent label de réédition Light in the Attic. Surprise : Another Side est tout sauf une bombe funk ! Essentiellement laid-back et acoustique, l’esprit du disque, entre folk pop, country soul et roots rock, est celui d’un singer-songwriter en phase d’introspection. Un conteur faisant souvent penser à James Taylor ou Leon Russell, mais aussi à Allen Toussaint voire aux œuvres les plus intimistes de Bill Whithers. De la narration assez introspective surtout. Celle d’un homme froissé par une rupture sentimentale, en proie à des questions existentielles et désireux aussi d’avancer grâce à sa musique. Deux Meters – George Porter Jr. et Ziggy Modeliste – sont ici à ses côtés, ainsi que le batteur James Black et Toussaint lui-même derrière son piano et son orgue. Étonnant d’écouter ces belles chansons (auxquelles vient s’ajouter une reprise de Your Song d’Elton John) qui auraient très bien pu propulser Leo Nocentelli vers une tout autre carrière. Étonnant surtout de découvrir qu’un trésor caché de folk soit signé par un guitariste funk… © Marc Zisman/Qobuz