Herbie Hancock
Herbie Hancock est l'un des musiciens de jazz les plus importants et les plus influents de la fin du XXe siècle. Pianiste vénéré, il est tout autant controversé par ses fans de la première heure, tout comme le fut son employeur et révélateur : Miles Davis. Mais contrairement au trompettiste qui ne s’est jamais retourné en arrière (sauf à l’extrême fin de sa vie), Hancock n’a jamais cessé de zigzaguer entre acoustique et électronique, classique, jazz et R&B, standards et compositions, solo et orchestre. Disciple, à sa façon, de Bill Evans, il a su rapidement imposé sa propre démarche harmonique et rythmique, ne refusant pas les influences noires américaines, blues, funk, gospel, rhythm’n blues, tout en absorbant les complexités de la culture classique. Il étudia aussi avec avidité tous les instruments électroniques apparus en force dès les années 70, du piano Fender Rhodes au Clavinet Hohner, de l'ARP Odyssey, l'ARP Pro-Soloist Synthesizer au Minimoog et toute une kyrielle de synthétiseurs dont il est un grand collectionneur. Mais son amour du piano acoustique semble toujours l’emporter, développant sur celui-ci un art consommé de l’harmonie et des formes rythmiques toujours plus complexes. Bref, du jazz au funk, du classique à l’électronique en passant par la pop, le rock, la soul, voir le disco et le rap, le pianiste ne cesse de bousculer ses habitudes et accule ses fans à réagir.
Herbert « Herbie » Jeffrey Hancock est né le 12 avril 1940 à Chicago. Il a débuté l’étude du piano dès l’âge de sept ans, devenant une sorte de petit prodige à 11, interprétant le premier mouvement du concerto de Mozart avec l’orchestre symphonique de Chicago. Il étudia ensuite au collège de Grinnell. Le trompettiste Donald Byrd lui offrit en 1961 son premier contrat en tant que sideman pour le label Blue Note, label qui ne tarda pas à lui proposer un contrat de leader. Son premier album « Taking Off » ne fut pas d’emblée un succès, il décolla véritablement avec la reprise de sa composition « Watermelon Man » mais par Mongo Santamaria. En mai 1963, c’est un autre trompettiste, Miles Davis, qui le convie à participer à son nouveau quintet pour l’enregistrement de « Seven Steps to Heaven ». Il restera avec le « Prince de l’ombre » pendant cinq ans. C’est Miles qui le poussera à s’intéresser aux autres claviers, le convertissant à cet instrument qu’il considérait à l’origine comme un jouet : le Fender Rhodes. Parallèlement, sa carrière sous son nom, sur le label Blue Note, donne des merveilles, offrant au jazz des compositions sophistiquées telles : « Maiden Voyage », « Cantaloupe Island », « Goodbye to Childhood » ou « Speak Like a Child » parmi tant d’autres. A la même époque, on l’entend également dans de nombreuses sessions East Coast pour le producteur Creed Taylor, entre autres, dans la musique du film de Michelangelo Antonioni « Blow Up », qui va le mener à participer à de nombreuses sessions pour le cinéma.
Herbie Hancock quitte Miles Davis en 1968 ( mais il continuera à apparaître aux côtés de Miles notamment dans « In a Silent Way », « A Tribute to Jack Johnson » et « On the corner » ), enregistre à son compte un album de funk « Fat Albert Rotunda », forme son sextet en 1969 devenant l’un des groupes leader du jazz rock naissant. C’est à cet époque qu’il approfondi ses rapport avec l’électronique, utilisant des pédales wah wah et tous les effets disponibles pour enrichir les sonorités psychédéliques de ses synthés.
En 1970, il devient Mwandishi cédant à la mode de transformer son nom pour le faire correspondre à son inclinaison spirituelle : le bouddhisme. En 1973, Herbie doit dissoudre son orchestre, faute de contrat suffisant pour le maintenir en vie. De cette époque, il retient que la seule chose qui compte est de « rendre son public heureux ». Il fonde un nouveau groupe, les Head Hunters et enregistre ce qui deviendra très vite un énorme succès, « Chameleon », sans doute son album le plus populaire à ce jour. Herbie continue sa démarche vers l’électronique, s’intéressant même un temps au disco qui fait rage dans les discothèques. En même temps, Herbie n’abandonne pas le piano acoustique et se retrouve dans un « all stars » célébrant la musique du quintet de Miles Davis des années 1965, avec Ron Carter, Tony Williams, Wayne Shorter, et Freddie Hubbard dans le rôle de Miles. Cette orchestre baptisé le V.S.O.P tourne abondamment en 1976 et lui permet de renouer avec ses fans, amateurs de jazz. Il donne même naissance à un renouveau du post bop dont Wynton Marsalis sera l’un des héros. L’orchestre durera jusqu’en 1992. La mort du batteur Tony Williams en 1997 mettra un terme définitif aux hésitions de reprendre ou pas des tournées avec cette formule.
A fond dans l’électronique, Herbie Hancock sort « Rockit » en 1983, gros succès sur MTV, le titre étant accompagné d’un clip novateur. A la même époque, le pianiste travaille avec le virtuose gambien de la kora, Foday Musa Suso. Il enregistreront en 1986 l’album « Jazz Africa ». Herbie joue beaucoup, avec les frères Marsalis, mais aussi, George Benson, Michael Brecker, et beaucoup d’autres. A la suite de son album de techno pop « Perfect Machine « en 1988, Hancock rompt son contrat avec Columbia (son label depuis1973), et signe avec Qwest (dont un seul album sortira, « A Tribute to Miles » en 1992). Il signera finalement un nouveau contrat avec Polygram en 1994 et enregistrera du jazz sous étiquette Verve et des albums de pop sous étiquette Mercury.
Sur cette lignée, alternant projets pop, electro et jazz, Herbie Hancock enchaine, bon an, mal an, des albums qui balisent le temps. En 1988, c’est un hommage à George Gershwin, relativement « traditionnel ». En 2001, dans sa veine électronique c’est « Futur 2 Futur ». Il revient au « pur jazz » en 2005 avec « Possibilities ». Son album hommage à la chanteuse Joni Mitchell, « River : The Joni Letters » cartonne en 2007. En 2010, Hancock réalise « The Imagine Project », album enregistré dans sept pays avec les collaborations de Dave Matthews, Anoushka Shankar, Jeff Beck, the Chieftains, John Legend, India.Arie, Seal, P!nk, Juanes, Derek Trucks, Susan Tedeschi, Chaka Khan, K'NAAN, Wayne Shorter, James Morrison, et Lisa Hannigan.
Herbie Hancock est désormais un ambassadeur du jazz de par le monde, président la journée internationale du jazz crée par l’UNESCO. Il est également membre du New Los Angeles Philharmonic. © JMP/Qobuz
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