Magic and Loss

Lou Reed

Paru le 1/01/70 chez Sire - Warner Records
Artistes principaux : Lou Reed
Genre : Rock

Disponible en

16-Bit/44.1 kHz Stereo

Musique illimitée

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3 ans après ses chroniques au vitriol de New York, Lou Reed sort avec Magic and Loss un de ses disques les plus tristes et intimistes. Dédicacé à deux proches récemment disparus, Doc Pomus et Rita, l’album est une enfilade de pièces funéraires que Lou Reed nous fait traverser avec une dignité sépulcrale . L’ambiance est froide et figée, les mots résonnent dans un vide qui habite chaque chanson, admirablement servie par la dignité des textes de leur auteur et la discrétion des musiciens qui l’accompagnent. Ceux-là même qui ont dynamité New York et l’ hypocrisie sociale de la société américaine (Mike Rathke, Rob Wasserman, Michael Blair) font ici preuve d’une délicatesse insoupçonnable.

Ainsi, même si on garde un peu d’entrain au début grâce à l’instrumental « Dorita » et le balancé « What’s good ? » qui aurait pu figurer dans l’album précédent, on réalise vite que ça ne sera pas une partie de plaisir : Lou Reed n’apporte que des réponses absurdes à ses questionnements (« A quoi bon ? La vie est comme du bacon avec un ice-cream ») et ceci ne présage rien de bon. Confirmation avec « Power And Glory » qui aborde frontalement le sujet du cancer à travers un texte imagé qui mêle radiations nucléaires et traitements aux rayons.

Lou Reed cherche un échappatoire à la dépendance physique, à la pesanteur usante qui dégrade les corps de ses amis et invoque ainsi tout à tour la magie (« Magician » , de loin le plus beau morceau du disque, don total de son corps à quiconque saura le maintenir en vie traduit par « Dedans je suis jeune et beau/Plein de choses pas finies/Et mon souffle s’en va ») ou l’humour noir (« Harry’s Circumcision » où le héros vieillissant préfère se mutiler que de ressembler à ses parents, la « déception ultime » pour l’auteur). Cette quête d’apesanteur ne mène pourtant jamais vers une quelconque croyance en un au-delà : dans « Sword of Damocles », il est écrit : « Peut-être quelque chose, au delà, quelque part/Un autre monde dont nous n’avons pas connaissance/Je sais que tu détestes ces conneries mystiques/Ce n’est qu’une autre façon de voir/L’épée de Damoclès au-dessus de ta tête ».

Alors d’abord résigné, Lou Reed assiste à la fin de ses proches, dans des chapelles mortuaires à la froideur glaciale, des salles d’hôpital dont il recrée l’atmosphère grâce à la précision des mots et à leur accompagnement musical effacé : c’est mal assis sur une chaise dure, dans « Goodby Mass », qu’on assiste à une messe d’adieu avant la « Cremation » et la dispersion des cendres, puis inerte, on plonge dans un « Dreaming » immobile, où le temps semble s’être arrêté et la voix de Lou Reed envolée.

Vient ensuite la réaction où le guitariste, à travers des riffs de guitare pesants, hurle son impuissance et ses regrets d’avoir manqué la mort d’un proche, de ne pas avoir su prévoir son départ (« No Chance », « Gassed And Stoked ») avant la transfiguration finale du titre « Magic and Loss » où Lou Reed entrevoit la rédemption par le feu de la douleur, aveu de ses faiblesses tout autant qu’ acceptation qu’ « il y a un peu de magie dans chaque chose/Et puis vient la perte qui remet tout en place ».

©Copyright Music Story 2015

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