Bruckner: Symphony No. 8

Chronique

Paavo Järvi ne fait pas mystère de sa passion pour Bruckner, dont on fêtera l’an prochain le bicentenaire de la naissance. A l’intégrale francfortoise entamée en 2006 pour RCA et une Deuxième sur le vif publiée par le label des Berliner Philharmoniker, l’Estonien ajoute un remake des trois dernières symphonies – « au moins », nous dit-on chez Alpha – avec l’Orchestre de la Tonhalle de Zurich, qu’il dirige depuis quatre ans. Quelques mois après une Septième fêtée par la critique, la Huitième, monumentale, impressionne encore plus. Les clés de la réussite ? L’efficacité d’une baguette de haute précision et l’irréprochable tenue de troupes aux aguets, mais pas seulement.
Tout en donnant du relief aux effets de blocs, en laissant érupter les tuttis, en travaillant les perspectives et en soulignant la cohérence des registres, les micros éclairent chaque pupitre de manière à obtenir une image aussi nette et détaillée que la vision du chef, donc mieux servi que pour sa première gravure. Entre frottements âpres (quels cuivres !), éloquentes inflexions (les bois), articulation au scalpel (le grouillement des violons et des altos dans le scherzo) et intense beauté de la grande ligne (les cordes graves dans l’Adagio), la partition nous est largement ouverte. Avant-goût de fin du monde, le finale, quoique plus lent qu’hier, plaque l’oreille au mur dès la deuxième mesure – de piano à fortissimo en une seconde ! –, avant des coups de mailloches à en crever les timbales. Terrifiant. © Nicolas Derny/Qobuz