Saint-Saëns: Symphonies, Vol. 2

Chronique

Camille Saint-Saëns a tout juste vingt ans lorsqu’il compose sa Symphonie en fa majeur « Urbs Roma » (Ville de Rome) pour un concours de composition musicale à Bordeaux. Il refusa toujours d’insérer cette œuvre dans son catalogue, sans qu’on ne sache vraiment pourquoi. Elle montre pourtant à la fois la précocité de son jeune auteur et sa parfaite assimilation du langage de Mendelssohn et Schumann dont elle s’inspire clairement. Jean-Jacques Kantorow semble tenir à cette oeuvre qu’il avait déjà enregistrée en 1997 à la tête du Tapiola Sinfonietta en Finlande pour le label BIS.

Avec sa durée de quarante minutes, c’est la plus longue des cinq symphonies de Saint-Saëns. Le jeune homme y met tout son savoir avec pas mal d’audaces de forme et d’harmonie qui firent gloser les tenants de la « tradition ». L’histoire est assez piquante si l’on songe que c’est le même auteur qui sera vilipendé soixante-ans plus tard pour son côté réactionnaire, ne comprenant plus rien aux hardiesses de Debussy ou à celles du Sacre du printemps de Stravinski… La vieille querelle des anciens et des modernes recommence à chaque génération.

Ce deuxième volume de cette nouvelle intégrale des Symphonies de Saint-Saëns a été réalisé au printemps 2020 dans la belle Salle Philharmonique de Liège à l’acoustique si généreuse, avec l’Orchestre Philharmonique Royal de cette même ville, un ensemble qui s’est peu à peu hissé au rang des grandes formations européennes. On s’en convaincra par la belle interprétation de la célébrissime Symphonie n° 3. Composée trente années après la Symphonie « Urbs Roma » semble émaner d’une autre plume. Il faut dire qu’entretemps Saint-Saëns a évolué et le monde musical a changé, entre une meilleure connaissance des symphonies de Beethoven d’une part et l’apparition des compositeurs russes et du génie de Wagner qui a révolutionné le langage d’autre part. Pour son ultime symphonie, Saint-Saëns utilise toutes les ressources du grand orchestre symphonique de son temps en y ajoutant même une partie pour piano à quatre mains et un grand orgue, magistralement tenu ici par le compositeur-organiste Thierry Escaich. © François Hudry/Qobuz