Eötvös conducts Stockhausen - Gruppen, Punkte

Chronique

Doté d’un esprit créatif inépuisable et inégalable, Karlheinz Stockhausen fait figure de pionnier dans tous les domaines de la recherche musicale. Punkte (« Points ») pour orchestre, composé en 1952, se situe dans cette optique.

Alors qu’elle ne durait que huit à neuf minutes, cette œuvre prolongeait la tradition sérielle post-wébernienne, avant d’être entièrement revisitée en 1962 pour se rapprocher encore plus du sérialisme intégral. Son titre d’ailleurs nous éclaire sur la texture même du sérialisme qui, en traitant chaque note comme une unité séparée, a donné naissance au « pointillisme », une musique faite essentiellement de touches isolées.

En effet, « les points sont devenus des centres de groupes, de colonnes, d’essaims, de masses en vibration, des noyaux d’organismes micromusicaux (…). Les intervalles et les tempi au sein desquels s’effectuent de tels mouvements restent constants pour des périodes plus ou moins longues, définissant ainsi des structures plus larges ». De par ce fait, la durée de cette œuvre s’est largement accrue et son orchestre augmenté.

Gruppen (1955-1957) est l’une des plus incontestables réussites de Karlheinz. Cette œuvre a la particularité de posséder trois orchestre, qui, lors de sa création le 24 mars 1958 à Cologne, était dirigée par Stockhausen lui-même (orchestre I à gauche), Bruno Maderna (orchestre II au centre) et Pierre Boulez (orchestre III à droite) ; soit un total de 109 exécutants.

Pour cette composition « en groupes » ambitieuse, Stockhausen utilise une échelle de tempo sérielle, mais l’utilisation de l’espace reste l’élément novateur avec ces trois orchestres placés dans diverses parties de l’auditorium. Cette musique spatiale est donc née de la volonté de faire jouer en groupes complexes simultanément, dans des tempos différents, de manière à ce que le public soit enveloppé dans la musique plutôt que de se cantonner au traditionnel rôle d’observateur.



Bien que doté d’une armature instrumentale traditionnelle, Stockhausen ouvre la voie à l’utilisation de l’espace acoustique : des instruments hors scène orchestrale, tel la guitare électrique, font alors leur apparition au sein de l’orchestre. C’est ici également que se situe l’avant-garde du compositeur car si des éléments de la musique dite « populaire » s’incrustent dans la musique « sérieuse », il en devient même possible qu’un groupe de pop use de musique « savante » électronique sans que cette association paraisse déplacée. La différence serait alors affaire de formation, de circonstance, de public et de maison de disque.



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