Walking Shadows (Album Version)

Chronique

Noir, c’est noir : il aura suffi aux Dogs d’à peine quelques mois pour perdre l’innocence et l’impétuosité juvénile de leurs débuts. Comme sur les pochettes des copains des sixties, on continue à les appeler Dominique, Hugues et Michel, mais les pistes se brouillent  désormais, en noir et blanc urbain, et en espace confiné, grillagé, encagé ( ?). Produit avec âpreté et comme à la maison, le deuxième album du trio rouennais cingle des paysages d’asphalte (« Walking Shadow »), et, déjà, décline la nostalgie d’un paradis d’insouciance perdu (« 79 (I’ve Lost My Mind In…) »). Saine réaction au péril évident de voir confiner le groupe dans un rôle de gardien du musée de l’orthodoxie du rock (chausse-trappe dans lequel sauteront à pieds joints les Flamin’Groovies), Walking Shadows agit, de plain pied dans son époque, comme l’outil de révolte d’une génération perdue.



La violence de l’inspiration brouille les pistes, les lumières se délavent, et les lignes de fuite se brisent sur des murs de béton. Peu de mélodies captables, une voix en retrait et saturée de réverbération, des guitares polluées et brouillardeuses, l’album offre également la remarquable particularité d’être (et c’est le seule enregistrement du groupe dans ce cas) uniquement constitué de compositions originales. Les dix chansons restent très naturellement et harmonieusement influencées par l’hypnose binaire du Velvet Underground, d’Iggy Pop et, plus génériquement, de la scène new-yorkaise de l’époque. Comme pour nous signifier que la surprise-partie est sans doute terminée, les Dogs délivrent ici un message qui sera repris, dans l’urgence de l’électricité administrée, par toute une génération de groupes (dont les angevins Thugs), plus soucieux d’implication que d’image.







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