The Unforgettable Nhøp Trio Live (Live)

Chronique

Alors, voilà : avec ses bugle et trompette, Paulo la Fraise a débarqué dans le troquet, comme d’habitude en retard. Il est tellement occupé à attraper le doux chant des oiseaux avec ses pavillons qu’il est souvent à la bourre. Riri échauffait déjà son piano du pauvre, tout en discutant le bout de gras avec un Jean blond, qui s’était d’autorité accaparé le clavier déglingué. Au début, les trois ont voulu faire les malins, interprétant du Ravel, des chansons du grand sud (Antonio Carlos Jobim), ou du Grand froid. C’est le Lundgren qui était content, qu’on évoque sa Scandinavie natale avec un air du folklore !

Mais c’est après une station en amoureux sur le « Que reste-t-il de nos amours ? » de Trenet que les choses ont réellement pris leur envol. Il faut dire que, si le Sarde et le natif de Cannes ont un caractère bien trempé (le Suédois ne dit mot, mais il n’en pense pas moins), ils ne donnent pas leur part aux chiens lorsqu’il s’agit de produire de la belle ouvrage : et que ça te déroule les arpèges, et des caresses de piston douces comme du velours, et des touches blanches et noires en épousailles !

Ils aiment bien faire guincher les étiquettes, aussi : offrir une langueur de tango, puis suspendre les mesures le temps d’une méditation (« Open Your Mind »), puis faire tourner une valse mélancolique qui se clôt en un tourbillon de dentelles coquines. Toutes les filles en ont été retournées, et les gars nous autres, ça nous a donné des idées. On serait pas des julots, on aurait bien écrasé une larme face aux gouttelettes de pluie de la musique. Mais on sait se tenir, alors on a simplement salué le culot de ces trois types (accordéon, piano et soufflerie : qui dit mieux ?), leur sens de la découverte, et la gestion amoureuse de leurs racines. L’instituteur en retraite a dit que c’était de la musique de voyage en chambre pour marins tristes : on n’a pas tout compris, mais on a demandé aux trois de nous remettre ça. Ils l’ont fait.

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