Held

Chronique

35 minutes seulement auront suffit à Holy Other, producteur énigmatique dont on ne connaît que la capuche qu'il arbore ostensiblement à chacune de ses apparitions et la musique, à nous faire pénétrer dans son univers somnambule. 

Après deux EP, le Mancunien d'origine exilé à Berlin dévoile un premier essai au son emblématique du label Tri-Angle dont il est issu, se rapprochant de la witch house de son homologue Balam Acab. Held distille une série d'instrumentaux entre dubstep, electronica et ambient sous couvert de plages vocales siréniques. La couleur générale de l'album est latente, caverneuse, un brin glaciale mais on s'y sent bien. Holy Other a l'art de créer une musique inquiétante mais rassurante, sombre mais lumineuse. C'est là que réside le génie paradoxal du Britannique : dans sa capacité à jouer avec des cycles rythmiques et vocaux donnant naissance à un patchwork sonore itératif dérangeant quand il ne procure pas l'effet inverse et invite lentement l'auditeur à se laisser bercer dans un abysse et une atmosphère amniotique.

Un vortex sonore où les samples R&B sont bidouillés de telle sorte qu'ils en deviennent spectraux tout en conservant l'essence lascive du genre (« U Know »), où snaps et nappes de piano ouatées viennent se greffer le temps d'un pont en apesanteur, apportant ainsi un supplément de chaleur (« Held »). Et au sein duquel l'élégie troublante demeure (« In Difference »). Un album court et cohérent : les titres se font échos et se correspondent (« W(here) » versus « Nothing Here », et « Tense Past » versus « Past Tension »), tant dans la dénomination que dans le climat mélodique. 

Le DJ au sweat aurait promis de se séparer de sa capuche lors de sa prochaine tournée. En attendant de connaître le visage qui se cache derrière, il dévoile un premier jet à la hauteur de quelques Pygmalions de la scène post-dubstep anglaise tels James Blake et Burial.
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