1999 (Live at Masonic Hall, Detroit, MI, 11/30/1982 - Late Show)

Chronique

Paru le 7 octobre 1982, le double album 1999 est alors le cinquième de Prince qui, jusqu'à présent, s'est distingué comme un talent original au goût provocateur sur les précédents Prince (1979) et Dirty Mind (1980) où il aimait exposer sa nudité sans négliger le contenu avec des titres comme « I Wanna Be Your Lover », « Sexy Dancer », « I Feel for You » qui sera un tube par Chaka Khan, ou la sulfureuse ode à la fellation « Head ». Compositeur et multi-instrumentiste doué, l'artiste allait par la suite confirmer tous les espoirs des amateurs de funk avec l'album Controversy (1981) et son succès homonyme irrésistible.

Malgré ses succès répétés dans les classements de ventes et en discothèque, le « Kid de Minneapolis » n'avait pas encore explosé à la face du monde et son audience, hormis les traqueurs de disques importés, se limitait au continent américain qui avait fait honneur à son inventivité. Star planétaire en devenir à deux ans du sacre mondial de Purple Rain (1984), Prince livrait pourtant avec 1999 un chef d'oeuvre absolu sur la longueur de quatre faces et seulement onze plages. En Europe, il fut cette fois accueilli avec ferveur, à l'exception de la France qui l'ignora superbement, mais dans certaines contrées d'Amérique du Sud ou d'Asie, c'est un album simple de sept titres qui avait cours. Classé n°9 aux États-Unis et n°30 au Royaume-Uni, 1999 fut certifié quatre fois disque de platine outre-Atlantique, une fois outre-Manche, et prit à peu près les mêmes positions lors de son apparition numérique en 2016.

Trente-sept ans après, à l'occasion de sa réédition en coffret de 5 CD et 1 DVD, l'oeuvre est jugée comme l'une des plus influentes et importantes de la carrière de Prince et a acquis un statut grandissant d'album culte, essentiel dans le développement synthétique du funk au cours de la décennie 1980. Son auteur visionnaire savait qu'il possédait de l'or entre les mains et les hits « 1999 », « Little Red Corvette », « Delirious » ou « Let's Pretend We're Married » sont devenus des classiques. Dès l'introduction majestueuse du morceau-titre après une astuce de voix passée au ralenti, 1999 s'avère excitant par ses tempos balancées de boîte à rythmes Linn, ses motifs de synthétiseurs entêtants et les interventions vocales du maître d'oeuvre et de ses choristes Jill Jones, Vanity, Lisa Coleman et Wendy Melvoin (qui formeront par la suite le duo Wendy & Lisa).

Truffé de trouvailles de production et de mélodies imparables, 1999 a dégainé cinq singles en ajoutant « Automatic » à la liste plus haut, et il n'a pas pris une ride tant son funk teinté d'électronique et de rock est depuis devenu le mètre-étalon de nombreux musiciens ou producteurs. Mais seul Prince sait vraiment faire monter la sauce, sans compter qu'il agite à nouveau son côté provocateur dans « D.M.S.R. » (raccourci de « dance, music, sex, romance », le titre sera supprimé de l'édition CD par « manque de place »). Il se fait également ironique dans « All the Critics Loves You in New York » et sert deux belles ballades au piano, l'hymne « Free » et « International Lover », qui lui vaudra son premier Grammy Award en 1984. Alors que paraissait l'hégémonique Thriller de Michael Jackson, l'album le plus vendu de tous les temps faisait alors de l'ombre à un autre chef d'oeuvre.

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