Sahra (Deluxe)

Chronique

Après deux albums (Khaled en 1991 et N’ssi N’ssi en 1993) propres à installer de façon durable et à l’échelle mondiale la renommée du chanteur de raï le plus célèbre au monde, Sahra (du prénom de la première fille du chanteur) tend à démontrer ses capacités à l’éclectisme et son goût pour les plaisirs musicaux divers.

 

Les différents artisans du projet réinventent par ailleurs une nouvelle tour de Babel : le violon libre de Vincent Courtois, IAM en alter ego pour une chanson embrumée d’un parfum méditerranéen et épicé (« Oran Marseille »), l’usine à tubes Jean-Jacques Goldman (ici « Aïcha ») ou Rita Marley en héritière tiers-mondiste. Si l’on adjoint à ce casting multiculturel la présence affriolante de quelques stars (Bernard Paganotti et sa contrebasse tellurique, le batteur Tony Williams), on comprend mieux que ce projet, produit par Don Was, Goldman et le multi-instrumentiste Philippe Eidel, puisse revendiquer toutes les apparences d’un regroupement de talents exceptionnels, quelque chose comme le gotha de l’époque en matière de musiques du monde.

 

Logique revers de la médaille, cet album, en façon de mosaïque (trois chansons enregistrées en Californie en compagnie d’un somptueux banc de requins de studio, trois autres gravées en Jamaïque avec les plus émérites gardiens du dogme reggae et d’un reliquat sous responsabilité hexagonale) pourrait souffrir d’un manque d’unité. Toutefois, il est un ciment impeccable à cette habile synthèse entre raï, electro, variété grand public et quelques mesures de rock tex-mex – souvenir de complaintes sahariennes, rap ou reggae – et la voix, puissante, ondoyante et chaude de Khaled.

 

Le chanteur est ici à son sommet et « Aïcha » (nouvelle pierre blanche dans sa carrière) n’en est pas la moindre preuve. Rayonnante et impériale, la chanson entraîne le disque – voyage musical, humaniste et séducteur – vers de nouveaux sommets de vente (500 000 exemplaires vendus en France).

 

Nouveau triomphe commercial sur le vieux continent donc, Sahra atteint en 1997 la treizième place des classements américains de vente d’albums de musiques du monde.



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