Cras: Piano Works

Chronique

Ahhhhh, voilà qui change avec bonheur des sempiternels pianistes qui se lancent dans un n-ième enregistrement Chopin, Liszt ou Rachmaninov : des œuvres pour piano de Jean Cras ! Cras, dont la vie et la carrière fut en quelque sorte un poème de l’art et de la mer : compositeur, il se disait esclave de la musique, contre-amiral (et major général commandant le Port de Brest, en passant) et s’estimait maître de la mer. Il ne choisit jamais entre l’une et l’autre de ces dévorantes vocations, poursuivit les deux avec égal bonheur, même si les mémoires collectives se souviennent plus aisément d’un compositeur et ses œuvres écrites à tout jamais, que d’un contre-amiral (même si, jusqu’à l’avènement de la calculatrice électronique, sa « règle Cras » fut un indispensable instrument de navigation !). Le pianiste Jean-Pierre Ferey lui-même, qui se charge de nous transmettre cette belle poignée d’œuvres de Cras, a suivi un parcours atypique : Polytechnique puis ingénieur de formation et de premier métier (géologie, géothermie), il décide de se consacrer à la musique après avoir remporté un prix au concours de Saragosse, en concurrence avec des brouettes de pianistes déjà professionnels… Ce n’est peut-être pas ici l’intégrale absolue du piano de Cras, mais une proportion très considérable de sa production hélas assez réduite en quantité, même si elle est immense en qualité. Les Poèmes intimes, égrenés de 1902 à 1911, y côtoient les deux Impromptus de 1926 – la fin de la vie du musicien –, ainsi que les Quatre danses et les Paysages de 1917. Une musique à découvrir sans tarder. © SM/Qobuz