à Fleur de Peau

Chronique

Tournant le dos aux écoles de jazz, la chanteuse française Cyrille Aimée a très tôt pris la décision de partir s’installer aux USA pour, de Brooklyn à la Nouvelle-Orléans, vivre pendant plus de 10 ans la rude école des jams sessions. Après avoir beaucoup exploré le répertoire de l’American Song Book et s’être peu à peu imposée comme une interprète de talent, mettant un timbre d’une grande fraîcheur et une vraie dextérité vocale au service d’un goût pour l’improvisation finalement assez rare chez les vocalistes, Cyrille Aimée ces dernières années a commencé de s’aventurer sur des territoires moins traditionnels, que ce soit en consacrant la totalité d’un disque à l’univers sophistiqué de Stephen Sondheim (Move On) ou en rendant hommage à la musique de la Nouvelle-Orléans (Petite Fleur, avec le New Orleans Jazz Orchestra).

A l’aube de ses 40 ans, elle signe aujourd’hui avec A fleur de peau son disque incontestablement le plus personnel à ce jour. Conçu en étroite collaboration avec le producteur et multi-instrumentiste new-yorkais Jake Sherman, cet album a la particularité d’être pour la première fois principalement constitué de compositions originales dans lesquelles Cyrille Aimée révèle sa vraie nature. Jonglant autant avec les langues (Anglais, Espagnol, Français) que les styles musicaux, puisant son inspiration dans les origines dominicaines de sa mère en pulsant ses mélodies de rythmes afro-latins alanguis (Historia de Amor) mais aussi du côté de la pop anglo-saxonne (Here), de la chanson française (Ma Préférence) ou de la soul eighties (cf. la reprise des Isley Brothers For the Love of You), Cyrille Aimée plonge sa voix mutine et sensuelle dans des écrins sophistiqués et hybrides mêlant instruments acoustiques aux accents vintage (riffs de cuivres et orgues voluptueux) et sonorités synthétiques délicieusement rétro. A l’arrivée cet album éclectique et plein de charme pourrait bien être le prologue d’un nouveau chapitre dans la carrière atypique et mouvementée de la chanteuse. © Stéphane Ollivier/Qobuz