Vulnicura Strings (The Acoustic Version: Strings, Voice and Viola Organista Only)

Chronique

On pourrait la croire ancrée à jamais dans les années 90 et l’aube des années 2000. Mais Björk est réellement une artiste en permanente évolution, toujours ouverte pour une remise en question personnelle ou artistique. L’année de ses cinquante ans, l’Islandaise n’avait pas dit son dernier mot comme le prouvait le magistral Vulnicura, troublant corps à corps entre technologies de pointe et sensations viscéralement organiques voire charnelles. D’une certaine manière, cette Björk de 2015 ressemblait davantage à celle d’Homogenic et de Vespertine qu’à celle, plus cérébrale, de Biophilia, son album paru en 2011. Sensation amplifiée par le fait que la chanteuse s’était rarement mise autant à nu. Sa rupture avec le vidéaste et plasticien Matthew Barney était au cœur de ce disque dense, tant dans ses paroles que dans les architectures musicales qu’il propose. Architectures magnifiques lorsque les cordes se fondaient dans le martial de rythmes industriels. La voix de la chanteuse – élastique et impressionnante comme jamais – s’immisçait dans cet océan créatif singulier. Pour l’aider dans sa tâche, Björk s’était entourée de deux complices de la sphère électro : le Britannique Bobby Krlic alias The Haxan Cloa et le Vénézuélien Alejandro Ghersi alias Arca. Elle conviait même, sur le titre Atom Dance, une autre voix ovni, celle d’Antony Hegarty d’Antony and the Johnsons. A l’arrivée, ce neuvième album studio rappelait la place majeure de son auteur sur la scène musicale contemporaine… Mais ici, Björk montre que les cordes se suffisent à elles-mêmes dans une version entièrement acoustique de Vulnicura où les rythmes électroniques laissent leur place à l’intemporalité d’une version purement symphonique. Dans cette nouvelle version, mixée par Chris Elms, seules ont été conservées les cordes originales et les voix, auxquelles s’ajoutent les solos de Una Sveinbjarnardóttir au violon et de Sławomir Zubrzycki au Viola Organista (enregistré en Pologne). Cet instrument imaginé par Léonard de Vinci et qui n’a été construit pour la première fois qu’après sa mort, et dont il n’existe qu’un exemplaire au monde, est un clavier dont les cordes sont frottées par une courroie à rotation perpétuelle, et non pincées ni frappées comme sur un clavecin et un piano… Une fois de plus, Björk nous étonne et nous ensorcelle. © MD/Qobuz