Rebirth of Innocence

Chronique

C’est en 2022 avec son premier album autoproduit Oan Kim & The Dirty Jazz, qu'a surgi de nulle part cet artiste franco-coréen aux talents polymorphes, dont on s’avisa rapidement du pedigree pour le moins atypique — tout à la fois photographe et réalisateur jouissant déjà d’une certaine forme de reconnaissance dans ces domaines et musicien inclassable passé par les prestigieuses classes du CNSM de Paris. Comme son titre y invite de façon à la fois ironique et programmatique, ce nouvel album, Rebirth of Innocence, sonne à bien des égards comme une sorte de remake (ou de subtile variation) du précédent, tant Oan Kim reprend là les mêmes ingrédients en cherchant principalement à ne rien perdre de la sorte d’ingénuité arty qui conférait à son geste initial l’essentiel de son charme paradoxal.

A la tête d’une petite formation composée de Benoit Perraudeau à la guitare électrique, Paul Herry-Pasmanian à la contrebasse et Simon Lemonnier à la batterie, Oan Kim, simultanément compositeur cinématique, songwriter inspiré, crooner délicieusement décadent et saxophoniste hanté par le vibrato propre à cette grande tradition de ténors allant de Ben Webster à Archie Shepp, brasse avec un vrai sens de la dramaturgie un vaste spectre de formes et d’influences pour fabriquer un univers musical à la fois onirique, romantique et sensualiste faisant le lien entre le jazz, la musique de genre, la pop, le post-rock et les musiques nouvelles. Élargissant sa palette de timbres et de couleurs en accueillant sur quelques plages le pianiste Dany Lavital, le trompettiste Romain Reidid, le batteur Edward Perraud ou encore la chanteuse Gabi Hartmann, Oan Kim nous plonge dans un monde flottant et délicieusement rétro, comme si Wong Kar Wai reconstituait, avec l’élégance allusive et sulfureuse qu’on lui connaît, les clubs new-yorkais des années 40. © Stéphane Ollivier/Qobuz