Ron Carter's Great Big Band

Chronique

L’intitulé pourrait presque suffire à lui-même, mais mérite néanmoins que l’on précise qu’il s’agit ici, aussi curieux que cela puisse paraître, du premier disque du contrebassiste virtuose et septuagénaire en tant que leader d’une grande formation, et que l’aventure, initiée presque accidentellement, résulte simplement du constat par lui-même que le jazzman américain ne s’était jusqu’alors jamais frotté aux réalités, joies et vicissitudes de ce type de line-up.



On retrouve dans l’orchestre les compagnons rythmiques habituels de Carter, Lewis Nash à la batterie et le pianiste Mulgrew Miller. Les vents sont menés par le saxophoniste ténor Jerry Dodgion, Tony Kadleck dirige les quatre pupitres de trompettes, et Jason Jackson en fait de même pour les trombones. Dans un répertoire ouvertement sélectionné dans ce que les auditoires espèrent entendre dans un grand orchestre, les dix-sept musiciens s’offrent quelques cavalcades référencées, grâce aux reprises du « Caravan » d’Ellington en ouverture, du célèbre et afro-cubain « Con Alma » composé par Dizzy Gillespie, et d’un « Saint-Louis Blues » que l’on doit naturellement à la plume de W.C. Handy.

Mais des pièces moins connus, dues à Sy Oliver, Gerry Mulligan, ou Wayne Shorter, démontrent que Carter s’est également laissé aller aux frissons de l’audace, ou aux plaisirs de la découverte : se succèdent alors swing, samba, blues, climats inspirés de l’imaginaire de Thelonious Monk, et thèmes initialement répertoriés pour trio, et, à plusieurs occasions, se fait jour la démonstration que le contrebassiste n’a rien perdu de la dimension percussive de son instrument. D’autant que plusieurs musiciens de l’ensemble ont mis la main à la partition (on pense en particulier au « Pork Chop » offert par l’arrangeur de l’entreprise, Bob Freedman.



Nouvel épisode flamboyant d’une carrière jalonnée d’étapes émérites (et riche d’une discographie, en tant que leader ou sideman, de plusieurs milliers de références), cet album déroule en treize déclinaisons l’évidente érudition d’un musicien qui retrouve la joie enfantine d’un jeu sans arrière-pensée, jusqu’au mitan de la limousine particulièrement luxueuse que constitue son Great Big Band.
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