Karaoke for One: Vol. 1

Chronique

D'ordinaire en duo, Insecure Men devient projet solo pour sa seconde sortie de 2018. Après un premier album sous leur nom, les deux potes d'enfance que sont Ben Romans-Hopcraft de Childhood et Saul Adamczewski (ex-Fat White Family, ex-Warmduscher, The Moonlandingz) s'écartent l'un de l'autre pour laisser à Saul l'espace nécessaire pour assouvir sa passion karaoké. Karaoké For One:Vol 1 est donc le premier volet d'une série de reprises. « Ce sont mes morceaux favoris, j’adore les chanter et ce sont ceux que je chanterais si j’étais maintenant dans un karaoké. » Toujours chez Fat Possum, l'Anglais édenté aux cernes brunes déballe donc son flot lent et son synthé sans subtilité, vernis propret qui cache la merde, trompe l'ennui. Pour autant, ici, pas de paroles dépressives comme à l'accoutumée, mais empruntées. Et l'on retrouve, méconnaissables, le tube kitsch 90's reggae/pop Mysterious Girl de Peter Andre et Bubbler Ranx (1996), les Carpenters (Rainy Days & Mondays), le Streets of Philadelphia de Springsteen, le Madame George de Van Morrison, le blues d'Abner Jay (I'm So Depressed) et même le bien malheureusement méconnu Blaze Foley (Picture Cards Can't Picture You). Sans doute la version qui retourne au plus près de l'originale. Ainsi, de ballades à l'amertume inconnue à la légèreté d'une pop mondiale, des aigreurs 70's au kitsch 90's, Saul Adamczewski aligne ses grands écarts/émois musicaux à l'année 2018, les maquille avec presque rien – une guitare et un synthé – et rend une pop exotica apprêtée. Mais toujours glauque, finalement. Simple et puissant. © Charlotte Saintoin/Qobuz