Blood, Looms & Blooms

Chronique

Après un trou noir créatif de huit ans dû à la mort de ses deux parents, Leila se relève et trouve la force de composer un troisième album. Résultat à la hauteur de l’attente : Blood, Looms And Blooms recèle des trésors en pagaille. Ce subtil équilibre entre paysages sonores riches et fracturés et mélodies célestes est à son apogée dans un mix à la fois appliqué et précis. A « sa famille », les exceptionnels vocalistes Luca Santucci, Donna Paul et Roya sa sœur, qui furent pour beaucoup dans son retour à la vie et à la musique, Leila adjoint d’autres amis musiciens et pas des moindres : Martina Topley Bird, ex-chanteuse de Tricky et Terry Hall le mythique chanteur des Specials déjà présents sur le projet Nearly God de…Tricky. Conçu comme un patchwork, Blood, Looms And Blooms développe une musique hybride des plus subtile de la planète électronique actuelle. Représentative du contenu musical, la pochette reprend le motif en miniature de la fille à la bicyclette des précédents albums inclus dans un univers coloré et délirant où se croisent Little Nemo, Terry Gilliam, voire le Delicatessen de Caro et Jeunet.



Preuve d’un relatif assagissement, l’instrumental d’ouverture « Mollie » restitue les sonorités saturées caractéristiques de Leila enveloppées d’une mélodie élégiaque et planante. Plus solennel, « Carplos » combine des motifs électro à des accords de synthés tout droit sortis des premiers Vangelis tandis que « The Exotics » est une délicieuse et vicieuse incursion dans la musique « lounge » estampillée sixties. On se laisse bercer par « Lush Dolphins », traduction musicale des cris de dauphins qui évoque les dernières B.O. de François de Roubaix : comparaison logique puisque Leila dit s’inspirer de documentaires animaliers pour sa musique. Tout en habiles crescendos, le terrifiant et hypnotique « Mettle » où des guitares animales se lovent sur des bruits d’eau énormes et envahissants est le clou instrumental de l’album et mérite à lui seul de l’acquérir.



Les morceaux chantés évoluent vers une certaine pop music telle la reprise du classique des Beatles « Norwegian Wood » désossé et transformé en ballade sombre et angoissante. « Time To Blow », étrange valse murmurée par Terry Hall, n’aurait pas déparé sur les derniers albums de Broadcast et de Stereolab. Sur « Ur Train », le clavecin féerique et la voix précieuse de Luca évoquent les plus belles heures du groupe pop The Left Banke. Unique titre chanté puissamment par sa sœur Roya, « Daisies, Cats & Spacemen » entrelace psychédélisme à la « Strawberry Fields Forever » et atmosphères à la John Barry. Martina Toppley Bird est impériale sur « Deflect » premier morceau rock de Leila au léger parfum Queens Of The Stone Age.



Le duo Terry Hall –Martina Topley Bird ferme l’album sur « Why Should I », note recueillie et apaisante confirmant que Leila a su dompter ses démons pour offrir l’œuvre la plus marquante de sa carrière.



François Belliion

©Copyright Music Story 2017