En 30 ans de carrière, Valérie Lemercier est devenue un pilier de la culture hexagonale, quelque part entre la figure comico-bourgeoise façon Jacqueline Maillan ou Sylvie Joly, et l’icône française « cool » façon Françoise Hardy. Dans son film "Marie-Francine", elle interprète une femme d’âge moyen contrainte de retourner vivre chez ses parents. Avec ce sujet, elle touche du doigt l’un des aspects les plus primordiaux de sa persona, ainsi que de son rapport à la musique: le retour vers le passé.

La musique c’est, entre autres, une mélodie et des harmonies. Mais pour Valérie Lemercier, c’est, avant toute chose, un rythme, lequel engendre chez elle un mouvement primitif, poétique et gratuit: la danse (ou tout du moins sa manière bien à elle de la pratiquer). La considérant comme un langage à part entière qui lui sert parfois à éviter la lourdeur des mots, la danse est l’un des terrains de jeu favoris de Valérie Lemercier, et elle est, bien entendu, indissociable de la musique. Dans certains films, même lorsque la danse est absente, la musique peut, de manière plus ou moins lointaine, évoquer cet art. Dans Palais Royal ! par exemple (V. Lemercier, 2005), le thème principal de la BO (Rond de jambe) est un arrangement d’un air populaire russe – et, par ailleurs, un grand classique des cours de danse, que les indéboulonnables pianistes des salles de répétitions connaissent par cœur. Le but de Valérie Lemercier est de faire ressortir le décalage éminemment comique entre, d’une part, l’aspect strict, douloureux et complexe de la danse (souvenons-nous de cette réplique de Géraldine Chaplin dans Parle avec elle de Pedro Almodovar en 2002 : « Je suis maîtresse de ballet et rien n'est simple »), et d’autre part, la force de vie spontanée et libératrice qui se dégage de cet art. 

 

Il y a ensuite ces films dans lesquels la chorégraphie a une place primordiale. C’est le cas que la comédie musicale Agathe Clery d’Etienne Chatiliez (2008) – où elle exécute un moonwalk dans son salon – et de Main dans la main de Valérie Donzelli (2012), qui raconte l’histoire de deux personnes (Jérémie Elkaïm et Valérie Lemercier) qui sont littéralement inséparables, ce qui génère un ballet étrange et cocasse. Dans d’autres films, les numéros sont plus ponctuels, et elle danse souvent sur des airs d’un autre temps, ce qui souligne l’adéquation entre la musique et un sentiment de nostalgie. Certains se souviennent du paso doble du Le Bal des casse pieds (Yves Robert, 1992), qu’elle exécute fougueusement face à Jean Rochefort, sur une musique de Vladimir Cosma. Elle croisera à nouveau le chemin de ce compositeur sur la scène du Châtelet, lors de la cérémonie des Césars en 2006, pour une reprise de la fameuse danse de Louis de Funès dans Les Aventures de Rabbi Jacob (Gérard Oury, 1973). On retrouve les rythmes latins dans Sexes faibles de Serge Meynard en 1992, avec le mambo Eso es el amor de Dario Moreno, à la fois dansé et chanté par Valérie Lemercier pour l’occasion. Et à la fin du Derrière (V. Lemercier, 1999), telle une enfant survoltée, elle esquisse quelques pas de danse avec un cheval, sur une musique au rythme flamenco.

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