La 100e édition du prestigieux Festival de Bayreuth, qui se tiendra jusqu’au 28 août, s’est ouverte sur fond de controverse…

Lundi 25 juillet, la 100e édition du Festival de Bayreuth s'est ouverte avec l'opéra Tannhäuser, sur fond de controverse autour de l'intention d'un orchestre israélien d'y jouer une œuvre du compositeur préféré des nazis, Richard Wagner. Chaque année, rapporte l’AFP, le gotha de la politique et du monde du spectacle allemand se retrouve pour l'ouverture de cette manifestation au Festspielhaus. La chancelière Angela Merkel, son ministre des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, et le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, étaient cette année au rendez-vous.

Si la nouvelle mise en scène de Tannhäuser par Thomas Hengelbrock, était très attendue, une autre controverse occupait les esprits. Aujourd’hui mardi 26 juillet, dans une autre salle du Festival de Bayreuth, l'Orchestre de Chambre Israélien (OCI), invité dans le cadre du bicentenaire de la naissance de Liszt, terminera son concert en interprétant Siegfried-Idyll de Wagner. Or, poursuit l’AFP, Wagner était un antisémite notoire, dont la musique était adulée par le régime nazi, qui avait, par ailleurs, fait de Bayreuth une sorte de « ville modèle ». L'œuvre de Wagner reste taboue en Israël, même si en juillet 2001, Daniel Barenboïm avait osé jouer un extrait de Tristan et Isolde, avec l'Orchestre Philharmonique de Berlin, à Jérusalem.

« Mon père et moi étions dans la salle », a raconté à l'AFP Dan Erdmann, 27 ans et premier clarinettiste de l'OCI. Barenboim « a dit que ceux qui souhaitaient ne pas l'entendre pouvaient sortir. Il y a eu environ 30 ou 40 personnes qui sont parties, parfois en criant, en jurant ou en claquant la porte. Mais à la fin ceux qui sont restés ont fait une ovation debout », a-t-il ajouté. Dix ans plus tard, la polémique reste vive en Israël. Le Ministre de la Culture a même dû intervenir pour que les subventions à l'Orchestre de chambre ne soient pas supprimées.

Hier encore, un communiqué de l'association des survivants de l'Holocauste et de leurs familles qualifiait la décision de l'orchestre de jouer du Wagner au Festival de Bayreuth de « rupture honteuse de la solidarité avec les personnes qui ont souffert des horreurs » nazies.

La ville de Bayreuth tente pourtant, à travers cette invitation et d'autres initiatives, comme le projet de création d'un centre culturel juif, de tirer les leçons de son passé. De même, Katharina Wagner, codirectrice du Festival de Bayreuth, et qui a parrainé la venue de l'OCI dans la ville, s'est engagée à ouvrir les archives familiales pour que les liens entre les Wagner et le national-socialisme puissent être étudiés de façon transparente.

« Elle le fera quand elle le fera. Mais quand elle le fera ce sera un geste positif », a dit à ce sujet à l'AFP, Felix Gothart, responsable de la communauté juive de Bayreuth, qui compte environ 500 membres, soit le double de ceux recensés en 1933, à l'arrivée au pouvoir d'Hitler. Toutefois, « je pense que la venue de l'orchestre aurait dû se faire de façon plus discrète », a-t-il ajouté, « à partir du moment où il y a ne serait-ce qu'une personne qui se sent blessée par le fait que du Wagner est joué par des Juifs en Allemagne, il aurait mieux valu ne pas faire autant de bruit autour ». Le récital aura lieu en fin de matinée, et le festival proprement dit pourra reprendre son cours normal par la suite…

Le site du Festival de Bayreuth