En trio, la jeune chanteuse engagée embarque le maloya de son île natale de la Réunion sur des sentiers singuliers...

En 2018, Ann O’Aro débarquait comme une éruption volcanique avec un premier album enragé et bouleversant. Sur une musique enracinée dans le maloya (le style traditionnel de la Réunion), la jeune Réunionnaise exorcisait en chantant une enfance blessée par l’inceste, la maltraitance et le suicide de son père. Cette confession violente aura au moins eu le mérite de lancer sa carrière d’artiste, entre danse et musique.

Ann O’Aro n’a pas tourné la page de son passé, mais elle écrit un nouveau chapitre de sa discographie avec Longoz. Dans une formule musicale différente, d’abord éprouvée sur scène : avec un percussionniste (Bino Waro) et un tromboniste (Teddy Doris), elle s’éloigne de la forme du maloya traditionnel. Mais elle l’embrasse sur le fond : la poésie créole, pour chanter les tréfonds de l’âme humaine, de l’addiction alcoolique en passant par la sexualité contrainte, encore et toujours l’inceste, ou tout simplement l’amour. L’accompagnement musical est dépouillé, et le ton grave. Mais pas plombé.

Ann O'Aro - Longoz l Néo Géo Nova

Radio Nova

Car ce qui sauve la musique d’Ann O’Aro, c’est toujours sa voix, dense et dansante, qui doit autant au blues qu’au maloya et tire parfois vers le flamenco. Une voix de femme sorcière, qui cherche la transe. Il y a quelque chose de liturgique dans le maloya d’Ann O’Aro, une puissance surnaturelle qui s’élève des rythmes ternaires et des chœurs. Le trombone emmène parfois les chansons de Longoz vers les rituels vaudous de la Nouvelle-Orléans, un autre monde créole dont Ann O’Aro n’a jamais fini d’explorer les secrets.

Ann O'aro en confinement

Anne-Gaëlle Hoarau

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