Stax Records a publié en juin l’anthologie « Written in Their Soul: The Stax Songwriter Demos », un coffret qui nous plonge dans les cuisines du mythique label de soul à travers 146 démos des Staple Singers, Carla Thomas ou Eddie Floyd.

Faut-il vraiment présenter le label Stax, La Mecque de la soul sudiste américaine ? Un label qui, de sa création à la fin des années 50 jusqu’au milieu des années 70 (et pour l’éternité) a enregistré et/ou produit certains des plus grands artistes soul de l’histoire : Rufus Thomas, Otis Redding, Booker T & The MG’s, Sam & Dave, Isaac Hayes, les Staple Singers, Albert King, William Bell, Carla Thomas et beaucoup d’autres. Des débuts comme entreprise familiale dans un ancien cinéma de Memphis jusqu’au grand concert Wattstax de 1972, le nom Stax est devenu synonyme d’une épopée américaine légendaire, documentée par d’innombrables rééditions, coffrets, livres, films et même un musée. Gage de qualité, la marque Stax a été relancée en 2007. Donc non, il n’est pas nécessaire de présenter Stax. Mais on peut faire mieux : redécouvrir Stax sous un jour nouveau.

Le fameux deuxième logo de Stax, représentant une main claquant des doigts, a été lancé en 1968. Et comme dans un claquement de doigts, plus de 140 titres inédits du catalogue Stax nous arrivent dans le coffret Written in Their Soul : The Stax Songwriter Demos. Ce ne sont pas des fonds de tiroir, ni l’ébauche de la 24e prise sans intérêt de morceaux déjà connus. Non, c’est autre chose : des démos, les versions de travail (plus ou moins avancées) des auteurs-compositeurs de l’écurie Stax, ces illustres inconnus pour la plupart. Des chansons au début du processus, qui n’ont pas encore été enregistrées dans leur version commercialisée (et certaines ne le seront jamais). Stax depuis les coulisses, les cuisines. Cette approche à la source, à la racine, est passionnante : on est au cœur de la créativité brute, sortie des tripes et du cœur, avant les éventuelles concessions à la production commerciale ou à l’air du temps. Et parfois, souvent, c’est magnifique.

Des exemples ? Le tube Respect Yourself de Mack Rice en version chant-guitare acoustique saturée, qu’on croirait jouée dans les années 90 par un chantre du grunge lo-fi. What Would I Do de l’inconnu Leon Moore, qui sonne comme le fantôme d’un ange tombé du ciel. L’immense Carla Thomas simplement accompagnée d’une guitare et un piano. Ce Walk On Back anonyme tout droit sorti d’une petite église en bois blanc. Le Ain’t No Love de Bettye Crutcher, ou le funk réduit à son essence. On pourrait multiplier les exemples : toutes les chansons des Staple Singers donnent le frisson.

William Bell - Slow Train (from Written In Their Soul/Official Visualizer)

Stax Records


Bien sûr, la mise au jour d’un tel trésor enfoui ne s’est pas faite en un claquement de doigts. La productrice Cheryl Pawelski (par ailleurs tenancière de l’excellent label Omnivore) a travaillé pendant plus de dix ans pour réunir ces archives oubliées, éparpillées dans différents entrepôts de maisons de disques après le dépôt de bilan de Stax en 1975. Elle a écouté 1 300 bandes, sélectionné plus de 600 chansons avant d’en tirer cette compilation ultime de 146 morceaux, déjà historique.

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