Le confinement de Roger Waters

Il aura beau dire le contraire, tout du moins laisser planer le doute quant à son réel ressenti, Roger Waters n’a jamais vraiment digéré le fait que Pink Floyd puisse exister sans lui aussi bien scéniquement que sur le plan discographique. Et même si la disparition de Rick Wright en 2008 a définitivement sonné le glas d’éventuelles retrouvailles, voir Gilmour continuer à jouer certaines chansons du groupe qu’il a quitté en 1985 doit toujours le gêner aux entournures. Après les pharaoniques tournées The Wall et Us + Them, le bassiste-chanteur s’est retrouvé bien malgré lui, coincé par une pandémie mondiale qui, presque trois ans après le premier confinement général qu’elle a provoqué, continue de marquer les esprits et de donner naissance à des albums enregistrés « à la maison ».

Roger Waters n’a pas échappé à cette tendance. Le nom de ce travail, The Lockdown Sessions, parle de lui-même. Voilà notre homme qui, en relation à distance avec de nombreux collaborateurs, réenregistre des titres du Floyd et les réarrange à sa manière. Les choix sont loin d’être innocents, Waters piochant dans les albums dont il dirigeait déjà pour ainsi tout de A à Z à l’époque, à savoir The Wall et The Final Cut (ainsi qu’un morceau tiré de sa discographie en solo, The Bravery of Being Out of Range). Une manière comme une autre de rappeler qui était le Boss à l’époque et de montrer que des chansons bien écrites dès le début ne pouvaient que traverser les années sans prendre une ride.

Si l’exercice reste intéressant sans nécessairement posséder la magie de l’époque, on ne peut s’empêcher de poser une oreille curieuse sur le Comfortably Numb 2022, plus posé et moins héroïque que l’original. Les nombreux chœurs de fin tentent de faire oublier le sublime solo de guitare de Gilmour sur une version plus longue de deux minutes que l’originale. Un pari qui fera débat auprès des puristes. Plus qu’un nouvel album, The Lockdown Sessions est surtout un exercice de style qui aura permis à son géniteur de ne pas perdre la main en attendant de réaliser ce qu’il a annoncé comme étant sa tournée d’adieu baptisée This Is Not A Drill. Parce qu’un jour, tous les héros ont le droit de goûter au repos.

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