A l'affiche de l'Opéra Bastille, la brûlante Lady Macbeth de Mzensk de Chostakovitch (interdite par la dictature stalinienne !) demeure un opéra essentiel au XXe siècle.

Du 17 au 30 janvier, Lady Macbeth de Mzensk de Chostakovitch s’installe à l’Opéra Bastille dans une mise en scène signée Martin Kušej. Sous la baguette d’Hartmut Haenchen, c’est une Eva-Maria Westbroek impériale qui prêtera sa voix à l’héroïne amoureuse et maudite de cette descente aux enfers créée au Théâtre Maly de Leningrad, le 22 janvier 1934.

Le livret de Lady Macbeth de Mzensk, opéra en quatre actes et neuf tableaux, est tiré d’une nouvelle de Nikolaï Leskov qui met en scène une jeune femme de la bourgeoisie de province qui s’ennuie et n’hésite pas à commettre des crimes pour pouvoir épouser son amant. Dans sa nouvelle, l’auteur donnait surtout une vision réaliste et satirique de la vie provinciale russe, mais Chostakovitch en a quelque peu changé l’esprit en faisant de Katerina le seul rayon de lumière au milieu des ténèbres : elle éprouve un sentiment amoureux, même si cela la pousse au crime, et cet amour, à ses yeux, la rachète. C’est cet aspect des choses, d’une dimension toute « dostoïevskienne », qui choqua les autorités soviétiques (et Staline lui-même) et leur fit écrire dans la Pravda, un an après la création de l’œuvre, un article taxant l’opéra de « pornographie » et de « galimatias musical ».

De fait, Lady Macbeth de Mzensk fut retiré de l’affiche et il fallut attendre près d’un quart de siècle pour que Chostakovitch en donne une nouvelle version, intitulée Katerina Ismaïlova, qui gomme les aspects du texte jugés trop audacieux et contraires à la morale soviétique et qui en édulcore la modernité musicale. Car sur le plan de l’écriture, l’œuvre fait appel, selon les besoins de l’action, aux procédés les plus variés, de la technique classique à la technique moderne, du tonal à la limite de l’atonalisme. Chostakovitch a recours à de nombreux leitmotive qui forment un système souple et complexe. De même, il emprunte au folklore pour les scènes à contenu social ou à l’opérette pour les scènes satiriques. Le rôle de l’orchestre est ainsi primordial et fait de la partition une synthèse des moyens musicaux offerts aux compositeurs du XXe siècle.

Lady Macbeth de Mzensk a été représenté pour la première fois à l’Opéra Bastille en février 1992, sous la direction de Myung-Whun Chung, dans une mise en scène d’André Engel, avec, entre autres, Mary-Jane Johnson/ Kristine Ciesinski, Jacque Trussel/ Alan Woodrow et Aage Haugland/ Anatolij Kotscherga.

Le site officiel d’Eva-Maria Westbroek

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