Comment deux jeunes bidouilleurs franciliens sont devenus les rois de la planète électronique en imposant un son bien à eux.

Si les Daft Punk n’ont pas marqué l’histoire du rock, ils ont sans conteste marqué celle de la musique électronique. Une empreinte considérable à laquelle la brève carrière rock du duo au sein du groupe Darlin’ ne nous avait pas préparés. Cette passade adolescente aux côtés de Laurent Brancowitz, futur membre du groupe Phoenix, aura au moins permis à Thomas Bangalter et Guy Manuel de Homem Christo de trouver leur nom. La légende veut que l’hebdomadaire anglais Melody Maker ait qualifié à l’époque la musique du trio de « daft punk », comprenez « punk débile ». Les Parisiens prennent une direction tout autre à partir de 1993, et sortent un premier single acid house sur le label anglais Soma. Viendra ensuite le titre qui attirera l’attention de toute la planète techno : le hit au groove imparable Da Funk, accompagné du célèbre clip à l’homme à tête de chien, réalisé par Spike Jonze. Le nom de Daft Punk est alors sur toutes les lèvres !

En 1997, la sortie du premier album Homework chez Virgin fait l'effet d'une bombe. Savant mélange de techno saturée et de house filtrée bourré de samples disco/funk, il emporte l'adhésion du public. La critique s'extasie devant cette combinaison d'influences inédites, et hisse le duo francilien en fer de lance de la très en vogue French Touch… Alors que leur notoriété grandit, Thomas et Guy-Man choisissent de cacher leur identité, et adoptent un look de robots rétrofuturistes. Volonté de mettre la musique au premier plan, protection ou snobisme ? Quelles que soient leurs intentions, un véritable mythe naît autour des Daft, renforcé par l'attente qui précède le second album, Discovery.

Paru en 2001, celui-ci constitue un virage pop 80's pour Daft Punk, marqué par l'utilisation massive du vocodeur. L'ensemble des titres sera utilisé comme bande-son pour un manga, Interstella 5555, réalisé par le créateur d'Albator. Une expérience réitérée la décennie suivante pour le film de science-fiction Tron : Legacy. Après Human After All, troisième album mitigé sorti en 2005, Daft Punk revient au sommet deux ans plus tard avec la tournée Alive 2007, dix ans après la première édition. Le duo se produit partout dans le monde et éblouit par ses performances scéniques, jouant du haut d'une imposante construction pyramidale. Peu importe la tournure que prend leur carrière, Bangalter et de Guy-Man ont écrit une page de la musique électronique. Pierre Henry, Jean-Michel Jarre. Daft Punk ? La réponse est oui lorsque le tandem refait surface en 2013…

Virage à 180° pour Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo ! Avec leur quatrième album intitulé Random Access Memories et qui paraît en mai 2013, les Daft semblent boucler l'ère de la musique électronique faite sur un simple laptop dans une chambre de 10 m² pour revenir à la bonne vieille méthode à l'ancienne. Célébration du beau son et hymne grandiose au mythe du studio d'enregistrement perçu comme une Mecque de la musique, ce Random Access Memories semble avoir été conçu à la fin des années 70, avec les moyens et l'hédonisme de cette époque où régnaient notamment le disco et le rock californien. Les influences on ne peut plus éclectiques s'entrecroisent comme par magie sur ce nouveau Daft : Chic, Steely Dan, Alan Parsons Project, Todd Rundgren, Pink Floyd, etc..

Pour épauler le tandem dans sa démarche rétrofuturiste, un impressionnant casting de stars, lui aussi éclectique, a fait le déplacement : du pape du disco Giorgio Moroder (dont la BO du film Midnight Express est entrée dans la légende) à Nile Rodgers (cerveau guitariste du groupe Chic) en passant par Paul Williams (Monsieur Phantom of the Paradise en personne !), Pharrell Williams, Todd Edwards, DJ Falcon, Gonzales, Panda Bear d'Animal Collective et Julian Casablancas des Strokes, difficile de rivaliser. Au final, Random Access Memories ne regarde pas uniquement dans le rétroviseur car le travail des deux musiciens français les plus populaires à l'étranger est bel et bien ancré dans son temps. Entre disco futuriste et pop ovni, ce quatrième Daft Punk est impressionnant et laisse entrevoir de nouvelles perspectives pour un groupe ayant su se remettre en question…

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