Tallis: Queen Katherine Parr & Songs of Reformation

Chronique

La longue vie de Thomas Tallis, quelque quatre-vingt ans, couvrit rien moins que quatre règnes : Henry VIII, Edward VI (qui ne régna que six ans, il est vrai, et encore, sous tutelle puisqu’encore mineur à sa mort), Mary I (Mary Tudor, ou encore « Bloody Mary ») puis Elizabeth I. À travers ces incessants revirement religieux, Tallis le catholique réussit à garder sa tête sur ses épaules – on s’entre-décapitait et s’entre-brûlait vif à tour de bras entre protestants et catholiques, à cette époque – y compris sous le règle d’Elizabeth I qui, consciente de sa qualité, le laissa plus ou moins tranquille et lui garda sa place au chaud à la cour. Il faut dire que le compositeur savait magistralement se conformer à ce qui lui était demandé, sans trop insister sur ses préférences… Cet album du magnifique ensemble vocal britannique Alamire dirigé par David Skinner, auquel se joint le consort de violes Fretwork, nous propose une belle poignée d’œuvres de Tallis de toutes les époques, dont en particulier une rareté (sans doute en première discographique) : une version primitive de son grandiose Gaude gloriosa dei mater à six voix, mais sur des paroles de la dernière épouse de Henry VIII’s, la reine Katherine Parr. Il s’agit là d’une très habile reconstruction : en 1978, on découvrit derrière des plâtras un manuscrit fragmentaire de ce Gaude gloriosa, avec un texte que l’on identifia rapidement comme étant issu d’un ouvrage de Katherine Parr. Il suffisait de reprendre le texte entier d’une part, la musique intégrale (connue dans une version ultérieure, en latin) d’autre part, et le tour était joué. Qualité vocale et instrumentale garantie de la meilleure tradition britannique. © SM/Qobuz