Sous France

Chronique

Moitié du duo Bouchées Doubles à ses débuts, Brav est un artiste engagé. Un vrai, un dur, un tatoué qui n'a pas peur de prendre des coups pour exprimer ​ses idées. Comme il le dit lui-même dans l'intro de l'album, Brav n'espère pas devenir riche avec ses rimes et cette vision de la Sous France. Un titre aux significations multiples que chacun pourra s'approprier suivant son ressenti après l'écoute de l'album.

La tonalité générale n'est de toute façon pas joyeuse. Brav appuie là où ça fait mal. Utilisant l'orgue et un format plus chanson que hip-hop, Brav souligne dans « À l'évidence » que même le moins bien loti d'ici peut faire envie aux vrais démunis de nombreux pays. Une réalité qui n'est pas assez expliquée et relativise la motivation de certaines révoltes contre le système.

Brav parle vrai, est direct et n'a pas peur de choquer malgré les paradoxes qu'il manie comme des bâtons de dynamite sur « I Hate Love ». Il n'hésite pas à s'attaquer au très délicat sujet d'« Outreau », où pédophilie, fantasmes, pauvreté, emballements judiciaire et médiatique forment un cocktail létal. Venu d'un coin de France délaissé par les touristes, Brav parle d'endroits et de coeurs qui ont oublié jusqu'à la saveur de l'espoir. Cette Sous France n'est certes pas riante mais c'est aussi la composante d'un pays qui a la chance de pouvoir compter sur des artistes à la parole libre et multiple.

Alternatif et atypique dans la production hip-hop nationale, Sous France est un album puissant, capable d'enclencher des réflexions et de pointer du doigt de nombreux paradoxes privés ou publics. Un disque assurément important qui remet Le Havre sur la carte de France musicale, bien des années après que le rock sauvage de Little Bob Story ne l'aie fait découvrir.

©Copyright Music Story 2015