Avec le virtuose David Krakauer, la musique klezmer sort de son ghetto pour embarquer avec elle, dans une embardée furibarde, le jazz, le rock, le hip hop et bien d’autres styles. Chaud devant !

Pape du renouveau de la musique klezmer, David Krakauer est un savant véritablement fou, couvrant aussi bien la tradition musicale yiddish que le free jazz, le rock le plus allumé et même l'electro la plus frappadingue. Au volant de son bolide Klezmer Madness, le clarinettiste tisse d'improbables mais solides liens entre ces genres apparemment antagonistes. Un vent de démence boosté par le souffle lyrique d'un Krakauer toujours survolté.

En publiant The Twelve Tribes en 2002, le New-yorkais atteint une sorte de sommet dans sa fusion atypique. La guitare déjantée de Kevin O’Neil plante d’entrée un décor qui pourrait être bancal dans sa radicalité mais semble comme évident au final. Et le reste de ce voyage fou fou fou est du même acabit. On ne sait plus si on assiste à un mariage juif pétaradant, si l’on se trouve à l’Est de l’Europe ou en plein Manhattan, si l’on est secoué par une déflagration improvisée, bref l’euphorie est totale !

Le génie de David Krakauer est ici d’allier le caractère festif de son entreprise à des ambitions de constructions souvent osées (Queen Of The Midnight Fax). Histoire d’amplifier l’hystérie ambiante, communicative à souhait, un autre savant fou, tout aussi dérangé, intervient sur As If qui boucle ce génial voyage agité et simplement génial qu’est The Twelve Tribes : le Canadien SoCalled qui apporte ses machines rafistolées et ses échantillonneurs bricolés pour insuffler un vent hip-hop à cette kermesse sonore, furibarde et groovy. Est-ce du jazz ? De la musique klezmer ? Du trip hop ? Juste un ouragan de folie emmené par un des plus grands virtuoses de la clarinette de sa génération.