Le fondateur du grand label de soul music, Jim Stewart, vient de s'éteindre à l'âge de 92 ans...

Motown au nord. Et Stax au sud. Deux conceptions bien distinctes de la soul music. Dans la moiteur sudiste de Memphis, Isaac Hayes, Otis Redding, Sam & Dave, Booker T. & the MG’s, Albert King, Eddie Floyd, les Staple Singers et quelques autres ont inventé un groove unique, biberonné au rhythm’n’blues, au blues et surtout au gospel. Tout au long des années 60, Stax de Memphis a engendré les plus grandes voix. Surtout, le label avait son propre son, en total opposition avec celui de Motown. Alors que Berry Gordy, fondateur de Motown, insufflait l’élément pop à la tradition rhythm’n’blues, Stax ancrait davantage son discours dans le rhythm’n’blues, le blues, le gospel voire la country.

The Story Of Stax Records 02b

Corporal Barbella

Jim Stewart, celui sans qui cette fascinante histoire n’aurait jamais été écrite, est mort le 5 décembre 2022. Créée sous le nom de Satellite Records à Memphis en 1957 par ce jeune sudiste et sa sœur Estelle Axton (le mot Stax compile les deux premières lettres de leurs noms), Stax est au nirvana de la soul music jusqu’à la fin des années 60. Né le 29 juillet 1930, Jim Stewart fut d’abord amoureux de la country et plus précisément du violon qu’on entend résonner dans le western swing de son idole Bob Wills et qu’il joue en amateur. Aidé financièrement par sa sœur (décédée en 2004), il achète un enregistreur Ampex 300 pour passer à la vitesse supérieure. Les premières sorties de Satellite furent d’ailleurs country et rockabilly avant que Stewart ne rencontre Rufus Thomas et sa fille Carla, deux futures pointures de Stax. En 1959, le jeune label s'installe dans l'ancien Capitol Theatre de Memphis dont l’auditorium est reconverti en studio, la scène ayant été transformée en cabine d’enregistrement. Pour économiser de l'argent, Stewart ne nivelle pas le sol. Un choix qui permet d’obtenir une acoustique unique, dotée d’un son lourd et grave.

"Respect Yourself: The Stax Records Story" Film Trailer

Concord Records

En évoluant vers le rhythm’n’blues et la soul, Stax offre une alternative à Motown. La personnalité même des deux patrons des deux maisons est à l’image de leurs empires respectifs. Alors que Gordy ne vise que les cimes, Stewart reste proche de ses troupes et produit lui-même une grande partie de ses enregistrements dont il est souvent l’ingénieur du son.

Stax Records - Jim Stewart

VISTLER

Mieux encore, Stax est un exemple d’intégration dans un Sud ségrégationniste. Et le groupe phare de la maison, Booker T. & the MG’s, est le symbole de cette mixité. Le blanc Stewart travaille avec des musiciens noirs et va même jusqu’à engager Al Bell, un autre afro-américain comme bras droit, à qui il revendra ses parts. Mais c'est une autre histoire...

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