L’actuel directeur de l’Opéra de Zurich, Alexandre Pereira, sera le successeur de Jürgen Flimm au poste de directeur du Festival de Salzbourg. Son mandat commencera le premier octobre 2011.

En 1918, dans une Autriche épuisée par la guerre, nombre de musiciens talentueux peinent à trouver un emploi. Pour leur assurer une rétribution temporaire, le metteur en scène Max Reinhardt, le poète Hugo von Hofmannsthal et le compositeur Richard Strauss décident de fonder un festival à Salzbourg, ville baroque auréolée par Mozart. Inauguré en 1920, le Festival présente avant tout des ouvrages lyriques de Mozart ou de Richard Strauss. À la fin de la seconde guerre mondiale, le Festival prend un sens tout nouveau : il représente désormais aux yeux du monde entier le visage d’une Autriche éternelle, artistique et humaniste, délivrée des démons nazis.

Après les ères Furtwängler, Karajan, Mortier et Flimm, le Festival de Salzbourg s’apprête à tourner une nouvelle page de son histoire. Le directeur actuel de l’Opéra de Zurich, Alexandre Pereira, prendra ainsi la succession de Jürgen Flimm le premier octobre 2011. Préférant rejoindre l’Opéra de Berlin, Flimm n'a pas renouvelé son mandat de cinq ans.

Né le 11 octobre 1947 à Vienne, Alexandre Pereira est issu d’une famille de diplomates. Il ambitionne dans un premier temps de devenir chanteur, mais ses parents lui déconseillent de suivre sa vocation : « J’ai toujours voulu apprendre le chant, mais ma mère pensait que je ferais mieux d’étudier quelque chose de plus « respectable » ». Il intègre ainsi le Bureau du tourisme autrichien et y demeure douze ans. Au cours de ces douze années il acquiert une expérience d’homme d’affaires, mais la musique lui manque. Sur le point d’être nommé à un poste important à Berlin, il abandonne sa carrière pour revenir à ses premières amours et se consacre pleinement au chant pendant onze ans.

Le résultat de cette dévotion à l’art lyrique sera plutôt mitigé : « Je ne suis pas devenu le chanteur mondialement célèbre que j’aurais rêver d’être. J’ai, par contre, commencé à organiser des concerts pendant mon temps libre ». Ses compétences managériales et artistiques se font rapidement remarquer : il est ainsi nommé secrétaire général du Wien Konzerthaus en 1984. Fort d’une formation diverse, Pereira possède effectivement des dons hors du commun : « Quand j’entends un chanteur aujourd’hui, je sais comment il chantera dans quatre ans. Cette écoute divinatoire m’est utile dans la mesure où une saison lyrique doit être planifiée quatre ans à l’avance ».

En 1989 il apparaît comme l’une des principales figures du monde musical autrichien, et on commence à parler de lui pour prendre la direction du Festival de Salzbourg — direction laissée vacante depuis le décès de Karajan. Il préfère finalement l’Opéra de Zurich au Festival, et en devient directeur en 1991.

Très saluée, sa gestion intelligente de l’Opéra de Zurich a doté cette institution d’une audience internationale. Tout en parvenant à conserver un budget stable voire bénéficiaire, Pereira a su organiser de brillantes productions, tel qu'un Lohengrin dirigé par Robert Wilson.

Deux constantes ont caractérisé l’engagement artistique de Pereira lors de son « règne » zurichois. En premier lieu, se fiant à son goût très sûr, il s’efforce de mettre en avant des chanteurs peu connus. Ensuite, il vise à atteindre le juste équilibre entre élitisme et séduction d’un public large : tout en se focalisant sur le « grand répertoire », il s’applique à promouvoir des œuvres plus rares – il crée ainsi l’opéra d’Heinz Holliger, Blanche-neige, d’après un roman de Robert Walser, ou encore l’opérette inachevée de Johann Strauss II, Simplicius.

Après vingt ans passés au sein de l’Opéra de Zurich, Pereira prend les rênes du Festival de Salzbourg — un choix effectué au détriment du Français Stéphane Lissner, ou du Néerlandais Pierre Audi, également envisagés. Ce juste retour des choses pose toutefois certains problèmes. Le successeur de Pereira à l’Opéra de Zurich, Andréas Homocki, n’arrivera qu’en septembre 2012, d’où une année vacante au cours de laquelle Pereira devra gérer deux institutions lyriques. Il semblerait néanmoins qu’un arrangement soit en cours entre Pereira et Homocki.