Le Festival d’Aix-en-Provence se déroulera du 7 au 27 juillet. Si Mozart est comme d’habitude à l’honneur de cette 64e édition, le festival met aussi en avant le baroque et la création contemporaine. Les concerts feront écho aux productions opératiques.

La programmation opératique est organisée autour du thème de l’opéra comme « miroir du monde ». Des « rencontres » se dérouleront autour de cette thématique, les 6 et 8 juillet, avec les metteurs en scène et les directeurs musicaux des opéras représentées: notamment Richard Brunel et Jérémie Rhorer pour les Noces de Figaro, William Christie pour David et Jonathas, opéra de Marc-Antoine Charpentier, George Benjamin pour son œuvre Written On Skin. Qu’elles soient baroque, classique, moderne ou contemporaine, ces représentations phares se veulent résolument actuelles.

L’opéra de George Benjamin, Written on skin, sera donné en création mondiale à quatre reprises au Grand Théâtre de Provence. Cette collaboration avec l’auteur dramatique Martin Crimp interroge les limites du pouvoir qu’un être peut exercer sur un autre. « Un riche propriétaire terrien invite chez lui un artiste chargé de réaliser un livre d’enluminures qui doit immortaliser en images l’impitoyable exercice de son pouvoir politique, et la paisible jouissance que lui procure l’ordre domestique, incarné dans l’humilité et l’obéissance enfantine de sa femme Agnès. Mais la réalisation de ce livre devient un catalyseur propice à la rébellion de l’épouse. Après une première tentative de séduction couronnée de succès, elle exploite sa nouvelle intimité avec l’enlumineur afin d’influencer le contenu même du livre, forçant son mari à la voir telle qu’elle est réellement – et ouvrant ainsi la voie à un ultime et extraordinaire acte de provocation » (synopsis issu du site du festival).

Outre l’événement que constitue la création de cet opéra, un concert symphonique du Mahler Chamber Orchestra (15 juillet) et un récital du pianiste Pierre-Laurent Aimard (10 juillet) permettront de découvrir d’autres facettes de ce compositeur. Les auditeurs auront également la possibilité d’entendre les compositeurs qui ont joué un rôle décisif dans la constitution de son style : Messiaen, dont il fut l’élève, Britten (concerts des 14 et 16 juillet), mais aussi Ravel (voir plus bas pour le « parcours Ravel ») et Debussy. Les Noces de Figaro de Mozart, données au théâtre de l’Archevêché tout au long du mois de juillet, ne seront pas moins en prise directe avec notre temps, porteuses de clés d'interprétation. Elles seront aussi l’occasion d’entendre le jeune Jérémie Rhorer à la direction musicale de l’orchestre baroque qu’il a créé en 2005, le prestigieux Cercle de l’Harmonie, après s’être formé auprès de Marc Minkowski et William Christie.

Le dénouement du Barbier de Séville de Beaumarchais semblait promettre à Rosine, devenue comtesse Almaviva et délivrée du vieux Bartolo, un avenir sans ombrages. Mais c’était sans compter sur la frivolité du comte, autour duquel se multiplient intrigues amoureuses et complots. C’est le même désir étourdi qui anime les personnages de La finta giardiniera (La fausse jardinière), opéra bouffe composé à 18 ans par Mozart, également donné tout au long du festival. C’est donc un Mozart moins connu qui sera à découvrir cet été, sans oublier le Mozart symphonique, avec un bouquet d’airs rarement entendus et une sélection de lieder, le 26 juillet. Deux intrigues tumultueuses qui, selon le mot de l’organiste Bernard Focroulle, directeur artistique du festival depuis 2007, sont aussi des leçons de sagesse, et mettent sous nos yeux, à plusieurs siècles de distance, nos propres expériences, intimes et collectives.

L’opéra de Marc-Antoine Charpentier, David et Jonathas, passera ainsi de l’intrigue de cour à une échelle plus vaste. Averti de l’imminence de sa chute, le roi Saül s’enfonce dans une folie meurtrière qui, sous prétexte de sauver ses proches, les précipite à leur perte. Dirigée par William Christie, grand habitué d’Aix, avec l’orchestre des Arts Florissants, cette tragédie biblique tirée de l’Ancien Testament raconte l’amitié entre David et le fils du roi Saül. Depuis sa création à la fin du 17e siècle, puis sa résurrection en 1981 à l’Opéra de Lyon, David et Jonathas a été rarement représenté. William Christie dirigera pour la première fois une version scénique du chef-d’œuvre de Charpentier, dont il a signé la version discographique de référence. La France baroque seront donc à l’honneur, grâce à cet ambassadeu du baroque français. En plus de revivifier cet opéra, Les Arts Florissants donneront deux concerts: l’un comprenant des oratorios latins de Charpentier (10 juillet), et l’autre un florilège de plus belles pages d’opéras français des XVIIe et XVIIIe siècles, vaste panorama où l'on pourra entendre Lully, Charpentier ou Rameau (le 18 juillet).

Autre pièce peu représentée à laquelle le festival donnera un nouveau souffle: la fantaisie lyrique de Ravel, L’enfant et les sortilèges, plus proche de la comédie musicale que de l’opéra. Après avoir détruit des objets et torturé des animaux dans un accès de colère, l'enfant prend conscience, au fil du récit, de ses erreurs, et découvre l’importance de l’empathie. Le livret, écrit par Colette, confronte l’enfant à la rancœur de ceux qu'il a blessés. Les sortilèges qui font vivre les meubles et parler les animaux, sont l’occasion pour Ravel de pasticher une multitude de genres musicaux, du jazz au foxtrot en passant par une polka, une valse et, en conclusion, un choral sacré.

Les représentations de l’Enfant et les Sortilèges seront d'ailleurs prétexte à se plonger dans l’univers de Ravel, et plus largement, dans la musique française du tournant du XXe siècle. Le London Symphony Orchestra, dirigé par Valery Gergiev, interprètera des œuvres de Ravel en concert, notamment son cycle de mélodies orientalisantes Shéhérazade, chanté par Renée Fleming (13 juillet). Cet hommage rendu au plus aimé des compositeurs français culminera lors de la Nuit Ravel (25 juillet). Une soirée Erik Satie complètera le tableau (23 juillet).

Le contemporain, enfin, ne se réduira pas à la programmation opératique. En effet, si George Benjamin figure au cœur du Festival d’Aix 2012 à travers la création de son opéra Written On Skin et plusieurs concerts dédiés à ses œuvres, d’autres grands noms de la musique contemporaine sont à l’honneur, notamment la compositrice franco-américaine Betsy Jolas, le 12 juillet, avec Marc Coppey au violoncelle et dans une rétrospective de l’œuvre de musique de chambre. Henri Dutilleux sera également joué par le London Symphony Orchestra, dirigé par Valery Gergiev. On pourra aussi découvrir de nouvelles créations associant musique de chambre et musique électronique par le flûtiste Magic Malik (master class et concert le 9 juillet).