Comment sera demain la musique contemporaine ? Cette interrogation peut sembler aujourd’hui saugrenue mais il n’est pas inutile d’y jeter une oreille.

La révolution numérique a fait exploser les frontières entre les arts. Un exemple parmi tant d’autres, le nouveau spectacle de Jean-François Peyret, Re : Walden que nous avons pu voir au Théâtre de la Colline à Paris en janvier dernier mêlait la musique du compositeur Alexandros Markeas (*1965) à une vidéo dont le défilement des images état synchronisé par un dispositif MIDI. Ainsi la vitesse de défilement du son ou de l’image pouvait interférer sur l’autre. De même, les doutes d’un Marcel Duchamp au début XXe siècle sur le statut de l’artiste ont des conséquences sur la musique, ainsi le compositeur danois Simon Steen-Andersen (*1976) a redéfini son statut d’artiste, il n’est plus la personne qui se cache derrière son œuvre pour monter sur la scène qu’après l’ultime note émise de sa partition, il devient un acteur principal de son œuvre, un « performer ». Sur son site internet on peut lire en toute lettre en anglais ce nouveau positionnement, « composer, performer and sound artist ». On peut percevoir une progression dans l’énonciation, il devient principalement un « artiste du son ».

Cette attitude se retrouve également dans l’attitude d’un compositeur comme François Sarhan (*1972) ainsi il détourne une vidéo « musicologique » commanditée par l’Université Evry-Val-d’ Essonne et le CDMC. Concernant Raphaël Cendo (*1975), c’est la dimension performative de l’interprète qu’il réévalue via la « saturation », il faut que l’énergie de celui-ci joue pleinement son rôle pour que la musique est lieue. Le corps de l’interprète devient le sujet d’une œuvre comme dans Rokh. Cette présence du corps est également présente dans la démarche du compositeur américain Nico Muhly (*1981) comme on a pu le voir aux Subsistances à Lyon en janvier dernier. Cette capacité à se mêler à de nouveaux projets artistiques montre le nouveau chemin à suivre pour les compositeurs de demain.

Le « projet » devient le sésame de l’œuvre. Tout est questionnable ! Le compositeur allemand Johannes Kreidler (*1980) réinterroge le statut de l’œuvre et celui de l’auteur. Il pratique l’échantillonnage, le remix et la vidéo. Il fait sa musique à partir de celle des autres. Il crée de nouveaux dispositifs où la musique est une des composantes d’un projet plus large. De même, l’artiste américain Matthew Barney et le compositeur Jonathan Bepler (*1959) proposent une œuvre multimédia, River Of Fundament que l’on pourra voir en première européenne le 14 mars à l’Opéra de Bavière. On le voit à partir de ces quelques exemples, la musique contemporaine participe pleinement au renouveau de l’art, une nouvelle constellation de l’art se met en place en ce début du XXIe siècle.