Architecte d’un swing toujours subtil, le pianiste René Urtreger est en concert pour trois soirs au Sunside à Paris.

En trio, en quartet et en quintet. Pour sa carte blanche au Sunside à Paris qui se déroulera les 18, 19 et 20 août, René Urtreger offrira trois configurations pour développer son art pianistique. Un moyen de rappeler, à ceux qui l’auraient oublié, qu’à 77 ans passés, le pianiste français jongle avec le swing comme peu de ses confrères. Au fil des années, l’épure prend même le dessus pour un piano tout en retenu, jamais gratuitement bavard…

Dans le monde du jazz, on l’appelle le Roi René. Quoique pas trop les manies d’un souverain, le bonhomme… Modeste dans ses propos, simple dans ses manières, discret sur ses exploits. Et pourtant, Urtreger a fréquenté du beau monde et, quand on connaît son histoire, on sait qu’il y aurait de quoi écrire le roman d’une vie dans le jazz… Installé à 18 ans sur la scène du Blue Note à Paris pour accompagner le saxophoniste Don Byas. Pianiste attitré de Miles Davis lorsque ce dernier fréquentait la Rive Gauche (c’est lui qu’on entend sur la bande originale d’Ascenseur pour l’échafaud de Louis Malle).

Dernier accompagnateur de Lester Young en studio, compagnon de Bobby Jaspar et Barney Wilen, enregistrant avec Lionel Hampton et Chet Baker… René Urtreger est l’un de ces musiciens européens qui, sans le savoir, inventèrent le son d’une époque et se firent les meilleurs serviteurs du jazz sur le Vieux continent. Des musiques pour le cinéma mais surtout des tournées avec les plus grands, de Dizzy Gillespie à Lee Konitz en passant par Johnny Griffin, Sonny Rollins et Stan Getz.

Mais aussi un musicien plongé très (trop ?) jeune dans ce monde de géants. Les stupéfiants, l’alcool, les excès, Urtreger en fera son quotidien. Jusqu’à être dégouté du jazz en général, du sien même… La parenthèse qui suivra se situera alors dans un univers autre. Celui de la variété. Aux côtés des Gainsbourg, Sacha Distel et autres Claude François, il passera plusieurs années à accompagner, dans l’ombre…

Et comme toutes les parenthèses, celle-ci s’acheva pour un retour en terre jazz. Une terre qu’il cultive seul ou aux côtés de ses complices multiples, qu’ils se nomment Daniel Humair, Yves Torchinsky, Eric Dervieu, etc. Ancré dans une tradition authentique, doté d’une érudition qui est le fruit d’une écoute amoureuse de la musique inventée par Thelonious Monk et Bud Powell, marqué à jamais par le be-bop, René Urtreger aime par dessus tout aller à l’essentiel, ne pas se mentir, ne pas se prendre au piège de l’exubérance facile et des métissages saugrenus. Il a parfois payé le prix de vouloir être, d’abord et avant tout, jazzman et de ne revendiquer que ce titre. Et chacun de ses concerts confirme bien que ce titre, il n’est pas prêt de le lâcher…

Le site de René Urtreger

Le site du Sunside