Kathleen Battle
Les réputations se défont parfois aussi rapidement qu’elles se sont faites. Aujourd’hui, c’est le disque qui a gardé le souvenir de Kathleen Battle, cette soprano légère afro-américaine à la voix si pure. Idole de toutes les scènes du monde dans les années 1980, elle subit une brusque disgrâce en 1994 lorsqu’elle fut renvoyée sans ménagement du Met, où elle était pourtant une des reines adulées par le public et par James Levine, le directeur musical de cette grande maison, où elle avait chanté 224 fois. Il faut dire que le caractère proprement épouvantable de la cantatrice avait sapé cette brillante carrière, laquelle avait commencé à battre de l’aile lorsque ses excentricités faisaient passer ses étonnantes possibilités vocales au second plan. Avec ses inflexions angéliques dont le timbre n’était pas sans rappeler parfois celui d’une Elly Ameling, elle fut une très émouvante Pamina (La Flûte enchantée), un délicieux et insolent Oscar (Le Bal masqué) une éclatante Adina (L’Elixir d’amour) aux côtés de Luciano Pavarotti, une virtuose Zerbinetta (Ariane à Naxos) et une ingénue Zerlina pour le dernier Don Giovanni dirigé par Karajan en 1987, qui l’avait déjà invitée à chanter avec lui, le 1er janvier de la même année, pour le fameux concert du nouvel an à Vienne. Son interprétation des Frühlingsstimmen (Voix du printemps), de Johann Strauss II, fit sensation devant des millions de téléspectateurs.
En 1989, Kathleen Battle enregistrait à Boston le Gloria et le Stabat Mater de Francis Poulenc sous la direction inspirée de Seiji Ozawa pour DG. Comment ne pas être ému en l’entendant chanter le Domine Deus du Gloria et le Vidit suum du Stabat Mater avec une ferveur exceptionnelle ? Sa voix, parfaitement fondue à l’ensemble, se fait instrument avec une ligne de chant très droite et presque sans vibrato. Le piétisme de Poulenc rejoint celui de la cantatrice élevée à Portsmouth au sein d’une famille proche de l’Église épiscopale méthodiste africaine.
Kathleen Battle a cessé de se produire à l’opéra aussitôt après son renvoi du Met, privilégiant le récital, airs baroques, jazz et negro spirituals. Mais la direction actuelle de l’institution new-yorkaise, en mal de vedettes, l’a réinvitée en grande pompe en 2016 pour un come-back très attendu. Avec un pianiste et une chorale à l’effectif impressionnant, la cantatrice a présenté son propre spectacle, Kathleen Battle : Underground Railroad – A Spiritual Journey dans lequel elle raconte ses antécédents musicaux et son héritage culturel, dénonçant l’esclavage et la soif de libertés de milliers de Noirs partis chercher la liberté vers le nord des Etats-Unis. Arrivée sur scène avec quarante minutes de retard, elle a pourtant tenu en haleine son public avec une voix intacte à 67 ans, chantant avec « une élégance éthérée », selon le critique du New York Times. Confortée par ce retour, Kathleen Battle continue à présenter son spectacle au cours de l’année 2018. Dotée par la nature d’une des plus belles voix de soprano colorature du XXe siècle, Kathleen Battle laisse de magnifiques enregistrements, souvent pour DG dont elle fut une des enfants chéries et qui sont le reflet de sa meilleure période. © François Hudry/Qobuz
Les réputations se défont parfois aussi rapidement qu’elles se sont faites. Aujourd’hui, c’est le disque qui a gardé le souvenir de Kathleen Battle, cette soprano légère afro-américaine à la voix si pure. Idole de toutes les scènes du monde dans les années 1980, elle subit une brusque disgrâce en 1994 lorsqu’elle fut renvoyée sans ménagement du Met, où elle était pourtant une des reines adulées par le public et par James Levine, le directeur musical de cette grande maison, où elle avait chanté 224 fois. Il faut dire que le caractère proprement épouvantable de la cantatrice avait sapé cette brillante carrière, laquelle avait commencé à battre de l’aile lorsque ses excentricités faisaient passer ses étonnantes possibilités vocales au second plan. Avec ses inflexions angéliques dont le timbre n’était pas sans rappeler parfois celui d’une Elly Ameling, elle fut une très émouvante Pamina (La Flûte enchantée), un délicieux et insolent Oscar (Le Bal masqué) une éclatante Adina (L’Elixir d’amour) aux côtés de Luciano Pavarotti, une virtuose Zerbinetta (Ariane à Naxos) et une ingénue Zerlina pour le dernier Don Giovanni dirigé par Karajan en 1987, qui l’avait déjà invitée à chanter avec lui, le 1er janvier de la même année, pour le fameux concert du nouvel an à Vienne. Son interprétation des Frühlingsstimmen (Voix du printemps), de Johann Strauss II, fit sensation devant des millions de téléspectateurs.
En 1989, Kathleen Battle enregistrait à Boston le Gloria et le Stabat Mater de Francis Poulenc sous la direction inspirée de Seiji Ozawa pour DG. Comment ne pas être ému en l’entendant chanter le Domine Deus du Gloria et le Vidit suum du Stabat Mater avec une ferveur exceptionnelle ? Sa voix, parfaitement fondue à l’ensemble, se fait instrument avec une ligne de chant très droite et presque sans vibrato. Le piétisme de Poulenc rejoint celui de la cantatrice élevée à Portsmouth au sein d’une famille proche de l’Église épiscopale méthodiste africaine.
Kathleen Battle a cessé de se produire à l’opéra aussitôt après son renvoi du Met, privilégiant le récital, airs baroques, jazz et negro spirituals. Mais la direction actuelle de l’institution new-yorkaise, en mal de vedettes, l’a réinvitée en grande pompe en 2016 pour un come-back très attendu. Avec un pianiste et une chorale à l’effectif impressionnant, la cantatrice a présenté son propre spectacle, Kathleen Battle : Underground Railroad – A Spiritual Journey dans lequel elle raconte ses antécédents musicaux et son héritage culturel, dénonçant l’esclavage et la soif de libertés de milliers de Noirs partis chercher la liberté vers le nord des Etats-Unis. Arrivée sur scène avec quarante minutes de retard, elle a pourtant tenu en haleine son public avec une voix intacte à 67 ans, chantant avec « une élégance éthérée », selon le critique du New York Times. Confortée par ce retour, Kathleen Battle continue à présenter son spectacle au cours de l’année 2018. Dotée par la nature d’une des plus belles voix de soprano colorature du XXe siècle, Kathleen Battle laisse de magnifiques enregistrements, souvent pour DG dont elle fut une des enfants chéries et qui sont le reflet de sa meilleure période. © François Hudry/Qobuz
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