A l'occasion de la sortie de son nouvel album Cielo e Mar, Qobuz met en ligne un entretien paru dans le magazine L'Express en mars 2006, du ténor mexicain. Parcours.

Ténor célébré aujourd'hui, ce Mexicain s'inscrit dans la lignée de Placido Domingo. Et le public applaudit.

1972. Naissance au Mexique

«Au XIXe siècle, mon arrière-grand-mère a quitté Vienne pour le Mexique. Et je suis né à Mexico, où j'ai passé mon enfance. Mes frères et sœurs sont devenus médium, caricaturiste, guitariste et écrivain. Moi, j'ai longtemps hésité. Un jour, en écoutant Placido Domingo chanter de la variété, j'ai eu envie aussi d'être chanteur. J'ai pris des cours, toujours à Mexico. Je me suis sérieusement mis au chant à 21 ans. C'est vieux. Au conservatoire, j'étais un peu l'attardé de service.»

1998. Encouragé par Domingo

«On dit souvent que Placido Domingo est mon modèle: c'est vrai! Après l'avoir entendu, j'ai acheté tous ses disques et j'ai pu découvrir le répertoire de l'opéra, rôle après rôle. J'ai gagné un petit prix au Mexique qui m'a permis d'obtenir mon premier engagement, dans La Bohème. Mais comment faire carrière dans un pays où il n'existe qu'un seul véritable Opéra? J'ai galéré pendant de longs mois à la recherche du miracle. Il ne venait pas. Je suis donc parti à New York forcer la porte des auditions. Personne ne voulait de moi. J'ai pris un nouveau prof de chant qui m'a fait découvrir ma voix et, au bout d'un an, j'ai enfin trouvé du travail aux Etats-Unis. Un jour, alors que j'étais à Pittsburgh, on m'appelle pour me dire que Domingo, mon idole, allait chanter à… Mexico. Chez moi! J'ai tout plaqué et je suis allé à sa rencontre. J'ai supplié tous les gens que je connaissais sur place de m'obtenir cinq minutes en tête à tête avec lui. Et ça a marché. Ce fut un moment magique qui a scellé mon destin et notre amitié. Après cet entretien-audition, j'ai été engagé en Europe, à Gênes, puis à l'Opéra Bastille. Le miracle avait eu lieu.»

2002. Installation à Paris

«J'ai rencontré ma future femme à l'âge de 16 ans, et nous nous sommes mariés quelques années plus tard. Au début, nous habitions au Mexique. Nous avons ensuite voyagé à travers le monde afin d'honorer mes contrats. Nous avons fini par nous fixer à Paris - à Neuilly, exactement - pour élever nos enfants. On peut vivre très bien en France une fois qu'on a compris que tout le monde se bat. Dans les transports, sur les trottoirs: c'est comme un sport, un grand défoulement. Moi qui viens du Mexique, j'ai le sang chaud et cette façon d'être me plaît. Depuis le début de ma carrière internationale, il y a six ans, Paris est devenu mon port d'attache: j'y chante au moins une fois par an.»

2005. Triomphe dans La Traviata à Salzbourg

«Bizarrement, la critique et le public n'ont retenu de ce spectacle que le couple que je forme avec la soprano Anna Netrebko. Un restaurant de la ville avait même fait peindre une fresque à notre effigie. Je ne suis pas particulièrement nombriliste, mais cela m'a fait plaisir. J'aime qu'on me regarde, qu'on me reconnaisse dans la rue. La célébrité ne me gêne absolument pas car j'ai l'impression d'être un type tout à fait normal… et, en même temps, un peu fou. Je sais que celui qu'on admire, c'est non pas vraiment moi, mais Rodolphe, Hoffmann, ou Roméo, les personnages que je joue et qui ne me quittent jamais vraiment. Tout cela finit par se mélanger: dans la vie, je suis devenu comme eux, extraverti, romantique, un peu excessif, mais toujours très sociable et attentif. Quand j'étais petit, je lisais beaucoup et je croyais connaître davantage les personnages des livres que les gens vivant autour de moi. Je ne suis pas sûr que cela ait vraiment changé!»

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