Le deuxième album du plus jeune des vieux soulmen...

Quand on fait paraitre son premier album à 63 ans (No Time For Dreaming en 2011), on se dit que percer dans la musique ne fut pas chose aisée pour Charles Bradley... Pourtant, le jeune-vieux poulain découvert par Daptone, label new-yorkais spécialisée dans le groove vintage sixties/seventies, n’avait pas chômé jusqu’ici. A moins que ce ne fussent plutôt les scénaristes de la vie de ce démentiel chanteur de soul sudiste, braillant comme Otis Redding et Wilson Pickett réunis, qui s’étaient affairés sur son cas comme des forcenés. Un scénario digne des Misérables pour ce natif de Floride, élevé par mamie mais récupéré par maman à New York, maman qu’il ne connait ni d’Eve, ni d’Adam. Une mère vivant dans la cave d’un immeuble délabré de Brooklyn. Les fugues logiques suivent. La clochardisation du jeune homme aussi. Mais l’électrochoc a lieu en 1962 lorsque Bradley entend James Brown à l’Apollo Theater d’Harlem. Le Godfather devient son modèle et le jeune adolescent passe des heures à l'imiter devant la glace. La gloire n’est pourtant pas encore à portée de main pour notre homme qui fuit les jupes de sa mère et s’engage dans les Jobs Corps, célèbre programme éducatif fédéral. Il devient cuisinier à travers tout le territoire (même pour la cantine d’un asile de fous !) avant d’être expédié au Vietnam où la guerre fait rage. Jetant l’ancre en Californie, il alterne entre petits boulots et shows dans d’obscures clubs où il peut enfin pratiquer ses imitations de Jaaaaaaaames Brown. Black Velvet est même son nom de scène ! Une occupation que Charles Bradley rapatrie à New York pour retrouver sa mère malade en 1996. Sa saga de Jean Valjean d’ébène trouvera alors son épisode ultime : l’assassinat de son frère par son neveu dans l’appartement de sa mère ! C’est aussi à cette époque que Bradley croise la route des taxidermistes de chez Daptone qui le poussent à coucher sur le papier sa tragique existence. Tel un prêcheur habité, jonglant entre gospel, ondes soul d’antan et énergie rhythm’n’blues, il existe enfin en tant que Charles Bradley. Plus vivant que jamais comme en atteste son nouvel album Victim Of Love, disponible le 1er avril en Qualité Studio Masters :

Charles Bradley "Strictly Reserved for You"

DaptoneRecords