Orfèvre des grands disques d’Al Green, l’immense producteur de Memphis s’est éteint à 81 ans.

Willie Mitchell est décédé à Memphis le 5 janvier. Le grand producteur de soul music était âgé de 81 ans. Né le 23 mars 1928 à Ashland dans l’état du Mississippi, il restera comme le grand architecte sonore des merveilles du label Hi Records dont la musique d’Al Green fut l’un des sommets de toute l’histoire de la soul music. Mais avant de devenir un maître de la production, Mitchell fut un très honnête trompettiste de jazz qui sévira notamment sur les premiers albums du bluesman B.B. King.

Willie Mitchell s’installe à Memphis en 1955 devenant un musicien majeur de la scène locale, croisant le fer avec des jazzmen du calibre de George Coleman, Phineas Newborn, Booker Little ou bien encore Charles Lloyd. C’est dans cette Mecque musicale du Tennessee qu’il rencontre le grand batteur Al Jackson, futur enclumeur chez Booker T. & The MG’s, et pièce maîtresse du « son Willie Mitchell » qui atteindra son zénith sur les enregistrements d’Al Green.

Sa collaboration avec Hi Records débute en 1961. Après quelques gentils tubes instrumentaux à connotation jazz pour ce label de Memphis, il se concentre sur la scène locale soul en pleine effervescence avec Bobby 'Blue' Bland, O.V. Wright, Syl Johnson, Otis Clay, Ann Peebles et, bien entendu, Al Green, qu’il rencontre pour la première fois en 1968. La légende veut qu’Al Bell, le grand directeur artistique du label Stax, ait appelé Green, trop tard, le lendemain même de la signature de son contrat chez Hi…

C’est en tout cas Willie Mitchell qui poussera le chanteur à trouver sa propre voix, l’éloignant des intonations de ses idoles qu’étaient alors Jackie Wilson, Wilson Pickett, James Brown et Sam Cooke. Dès leur première collaboration, Green Is Blues, les cuivres sont mis en exergue, le kick d'Al Jackson ponctue ça et là la mélodie, la voix d’Al Green avance à pas de velours, avec sensualité, Mitchell gérant seul les arrangements, la prise de son et la production.

En 1970, avec l’album suivant, Al Green Gets Next to You, le tandem décroche la gloire avec quatre singles classés disque d’or. Let's Stay Together (1972) sera un succès bien plus immense, tout comme, la même année, le génial I'm Still In Love With You. La suite est du même acabit avec d’autres délices érotiques comme Call Me ou bien encore Al Green Explores Your Mind.

Clairement, de 1970 à 1977, le label Hi offre les plus belles productions de soul music. Les disques de la chanteuse Ann Peebles furent eux aussi des enregistrements raffinés et torrides.

En 2003, Green publiera l’album I Can't Stop, sa première collaboration avec Willie Mitchell depuis He Is The Light en 1985. Deux ans plus tard, le binôme remet le couvert avec Everything's OK.

Récemment encore, Willie Mitchell était loin d’avoir levé le pied, travaillant pour des gens aussi divers que le jeune loup de la nu soul Anthony Hamilton, écrivant les arrangements de cordes et de cuivres du dernier album de Rod Stewart ou bien encore produisant un prochain album d’une autre légende de la soul, Solomon Burke. En 2004, la ville de Memphis donna même son nom à un boulevard.