En tournée à Varsovie, Budapest et Prague cette semaine, le Philharmonique de Berlin ne sera donc pas en direct dans la Salle de concerts numérique. A la place, fouillons donc dans les Archives de ladite salle : [Karajan par Clouzot->http://www.digitalconcerthall.com/en/concert/217], par exemple ?

Ce n'est pas UN orchestre mais quasiment DEUX que dirige Herbert von Karajan pour cette fulminante Cinquième - celle dont on n'a pas besoin de citer le compositeur pour savoir qu'elle est de lui -. Une marée de cordes (20 premiers violons, 18 seconds, 14 altos, 12 violoncelles, dix contrebasses !), les bois par quatre et non par deux tels qu'exigés par la partition, huit cors au lieu des quatre, sans oublier les trombones et les trompettes à l'avenant... Il n'y a que le timbalier qui reste seul, mais on n'imagine guère, en effet, deux timbaliers taper de conserve dans la Cinquième : l'unique musicien tape donc d'autant plus fort. Et tout ça est filmé par rien moins que l'immense cinéaste Henri-Georges Clouzot qui sait conférer à sa captation une véritable dimension diabolique.

Certes, de nos jours, on estimerait peut-être que ce déluge orchestral bi-karajanesque a quelque chose d'un peu mégalomane sur les bords, mais après tout, pourquoi pas... d'autant que les musiciens du Philharmonique de Berlin savent magiquement se fondre en un son cohérent, et que cette musique surpuissante s'accorde fort bien d'une telle conception. Les prises de vue de Clouzot, qui joue magistralement sur les contrastes, offrent une introspection dans la masse de l'orchestre, dans ses tripes, et l'absence de décor - on n'est pas même dans la Philharmonie de Berlin qui, en l'année 1966 où est tourné ce film, existe déjà depuis trois ans, mais dans un studio parfaitement neutre - rajoute encore à la concentration de la vision du spectateur. L'orchestre est disposé d'une manière assez peu confortable, les musiciens les uns sur les autres - alors qu'il resterait de la place dans la salle. Clouzot aura-t-il voulu souligner l'impression de force taurine, brute, irrésistible de l'ensemble et de l'ouvrage ? Note plaisante en passant : l'observateur pointilleux remarquera qu'à cette époque, l'Orchestre Philharmonique de Berlin est un club exclusivement masculin ; pas une seule dame parmi les musiciens !

En seconde partie de document, Clouzot filme Karajan en répétition, en discussion sur l'art du chef d'orchestre, et en masterclass. Le tout en certes allemand, sous-titré en anglais, mais le film vaut vraiment le détour.

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