A partir du mercredi 29 octobre, les sénateurs examinent en première lecture un projet de loi contre le piratage visant à dissuader les internautes de télécharger illégalement des œuvres, d'abord en leur envoyant des avertissements, puis en suspendant leur abonnement à internet pour une durée de un à trois mois.
Selon l’AFP, la commission des affaires culturelles du Sénat a adopté une cinquantaine d'amendements afin d'améliorer « l'équilibre » du texte et « mieux concilier les droits des créateurs et ceux des internautes », a souligné le rapporteur UMP du projet de loi Michel Thiollière.
Ces amendements, qui ne bouleversent pas le dispositif proposé par le gouvernement, ont été bien accueillis par la Ministre de la Culture, Christine Albanel. Sa « seule réserve » porte sur un amendement introduisant la possibilité d'une suspension partielle de l'abonnement (on laisserait à l'internaute certains services comme la messagerie) si l'évolution technologique le permet, selon son cabinet.
Le projet de loi « favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet » vise à faire cesser « l'hémorragie des œuvres culturelles sur internet » et à favoriser le développement de l'offre légale de musique, films et programmes audiovisuels sur le web, précise l'examen des motifs du texte.
« La France détient le triste record de champion du monde » de la piraterie sur le net, selon Christine Albanel. Un milliard de fichiers piratés d'œuvres ont été échangés dans l'hexagone en 2006. Pour lutter contre ce phénomène, le projet de loi crée une Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur l'internet (Hadopi), que les ayants droit pourront saisir s'ils constatent que leurs œuvres font l'objet d'un téléchargement illicite.
L'Hadopi enverra un premier avertissement par courriel à l'internaute. S'il recommence, il recevra un nouvel avertissement par lettre recommandée. Après cette phase préventive et pédagogique sur laquelle le gouvernement compte beaucoup, l'autorité administrative indépendante pourra passer aux sanctions. L'internaute risquera une suspension de trois mois à un an de son accès à internet. Sauf s'il accepte une transaction et s'engage à ne pas recommencer, auquel cas la coupure pourra être ramenée entre un et trois mois.
Pour les entreprises et les établissements collectifs, le texte prévoit une mesure alternative. L'Hadopi leur demandera d'installer des pare-feux pour empêcher les salariés ou les utilisateurs de pratiquer le téléchargement illégal depuis leur poste. Le projet de loi constitue la transcription législative des accords de l'Elysée préparés par l'ancien PDG de la Fnac, Denis Olivennes, et signés le 23 novembre 2007 par une quarantaine d'organismes représentant les secteurs de la musique, du cinéma et les fournisseurs d'accès à l'internet.
Le gouvernement a choisi de présenter le texte sans attendre que la position de l'Union européenne sur ce type de dispositif soit clarifiée. Fin septembre, les eurodéputés ont inclus dans « le paquet télécom » un amendement déposé par le député socialiste Guy Bono stipulant qu'aucune restriction aux droits et libertés des internautes ne peut être imposée sans une décision judiciaire préalable.
La France n'a pas obtenu de la Commission européenne qu'elle retire l'amendement Bono. Paris compte demander son retrait lors du prochain conseil européen des ministres des télécoms.