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Suzanne Danco

« Shéhérazade ! » s’était exclamé Leonard Bernstein avec un large sourire, un soir qu’on lui présentait Suzanne Danco à Florence, à l’issue d’un concert qu’il avait dirigé au Mai Musical. Il se souvenait du fameux enregistrement du cycle de Ravel que la cantatrice belge avait enregistré avec Ernest Ansermet. Trois mélodies qu’elle adorait chanter et dont elle laisse trois enregistrements en studio (un avec Charles Munch et deux avec Ansermet). Deux autres traces ont conservé des versions de concert avec Munch et avec Ancerl.


Suzanne Danco était une diseuse, sa diction était impeccable en toutes les langues, car elle travaillait longuement la prosodie d’un texte avant de commencer à mettre de la musique dessus. Très douée pour le chant dès sa jeunesse, elle a cependant été contrariée par sa famille qui ne voulait pas d’une fille artiste. Il a fallu l’intervention de la Reine Elisabeth en personne pour qu’elle puisse travailler et donner libre cours à sa passion pour le chant. Sa découverte de l’Italie, où sa carrière débute en pleine guerre et qu’elle ne connaissait qu’à travers les peintres du Quattrocento, est une véritable révélation qui la décide de s’installer sur les hauteurs de Florence, à Fiesole, où elle passera le reste de sa vie.


Suzanne Danco était une grande mozartienne doublée d’une interprète inspirée de la mélodie française. A l’opéra, elle incarnait une Mélisande idéale avec ce mélange d’ingénuité et de rouerie (« Je ne mens jamais, je ne mens qu’à ton frère »). Avec sa voix claire, son intonation parfaite et son vibrato serré elle faisait le régal de Francis Poulenc qui lui fit un jour une belle dédicace sur une de ses partitions : « Si Suzanne Danco, sublime Elvire, daigne descendre de Mozart à Poulenc, je n’oserais en croire mes oreilles. Très fidèlement. Francis. 1949 ». A cette époque, elle était la Reine du Festival d’Aix-en-Provence créé l’année précédente. En scène, elle était une Donna Elvira très en colère sous la direction de Hans Rosbaud, mais c’est Donna Anna qu’elle chanta dans l’enregistrement légendaire de Don Giovanni, sous la direction de Josef Krips, enregistré à Vienne par DECCA quelques années plus tard, avec Cesare Siepi, Lisa Della Casa et Anton Dermota. C’est avec les mêmes chanteurs de l’Opéra de Vienne qu’elle enregistra aussi Les Noces de Figaro (Cherubino) avec Erich Kleiber qui fut un des mentors de sa jeunesse.


Amoureuse de l’opéra italien qu’elle rêvait de chanter, elle auditionna devant Toscanini qui lui dit avec mépris qu’elle n’était qu’une chanteuse de Lieder et d’oratorios. Elle se détourna dès lors de ce répertoire, ne chantant qu’occasionnellement Rossini ou Bellini en concert. C’est peut-être grâce au jugement négatif du grand chef italien que nous devons la belle carrière de Suzanne Danco dans le domaine de la mélodie française qu’elle a si bien chantée et enregistrée. Ernest Ansermet adorait cette cantatrice avec laquelle il réalisa de nombreux disques, Pelléas et Mélisande de Debussy dont il était un des spécialistes, des mélodies de Ravel, ainsi que L’Heure espagnole et L’Enfant et les sortilèges, le Roi David d’Arthur Honegger, le Requiem de Fauré, le Martyre de Saint-Sébastien de Debussy et le Tricorne de Manuel de Falla.


Suzanne Danco a eu la chance d’enregistrer tout son répertoire pour DECCA et ses nombreux enregistrements de radio nous valent des merveilles, comme ce Pelléas et Mélisande londonien dirigé par Inghelbrecht ou le rare Socrate de Satie dirigé par Darius Milhaud. La carrière de Suzanne Danco, relativement brève, fut stoppée nette à la suite d’une malencontreuse opération des cordes vocales. Profondément atteinte dans son moral, elle s’adonna un peu plus tard à l’enseignement pour éviter à ses jeunes élèves de commettre des erreurs fatales qui pourraient abîmer leur voix. © François Hudry – Novembre 2017/Qobuz

Discographie

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