Abd Al Malik - L'Art et la révolte

Rappeur, slameur, poète et écrivain, Abd al Malik a révolutionné le hip hop et s’est imposé comme une référence du rap néo-classique au cours des dernières années. Quatre fois consacré aux Victoires de la musique, lauréat du Prix littéraire Edgar Faure, il n’hésite pas à proposer des créations innovantes, osant le chant et la langue anglaise. Mais son inspiration, c’est surtout dans la littérature qu’il la puise. Ses différents albums reprennent ainsi la parole de Verlaine, Spinoza, Sénèque, ou encore Césaire, dans un mélange des genres où la poésie règne.

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C’est Albert Camus qui est mis à l’honneur le 12 avril au Théâtre de Suresnes à l’occasion du centenaire de sa naissance, avec la création de textes inédits s’inspirant en particulier de l’une des œuvres de l’auteur : « L’envers et l’endroit ». Ce petit livre, l’une des premières créations de l’écrivain qui n’avait alors que 22 ans, est aussi l’un des premiers ayant marqué le slameur.

Les 5 nouvelles qui le composent prennent des airs d’autobiographie dans lesquelles Abd al Malik se retrouve. Les décors ensoleillés d’Alger où Albert Camus a grandit, entouré par la pauvreté et élevé uniquement par sa mère, lui apparaissent comme le reflet de sa propre vie : après quelques années sous le soleil du Congo, Abd al Malik a grandit sans son père dans un quartier difficile de Strasbourg.

Mais le spectacle s’inspire aussi, et même surtout, de la préface de cette œuvre écrite 20 ans plus tard par l’auteur. Dans celle-ci, Albert Camus semble presque s’excuser du jeune écrivain maladroit qu’il était et, dressant une sorte de bilan sur les années passées, décrit cette œuvre comme la source philosophique de toutes les suivantes.

Pour lui comme pour Abd al Malik, la culture et l’éducation ont joué un grand rôle, et c’est pour cela qu’ils partagent une même philosophie : chacun détient la clé de son destin, il n’y a pas de fatalisme, pas de déterminisme social. La culture les a tous deux arraché à une condition précaire et leur ont permis de s’élever socialement.

C’est là le thème prédominant de ce spectacle dans lequel Camus apparaît comme le grand frère spirituel d’Abd al Malik, et Abd Al Malik comme la réincarnation moderne de l’écrivain. Sur une scène baignée par la lumière chaude des pays d’Afrique se retrouvent l’Orchestre Philharmonique du Pays d’Aix, le chanteur Mattéo Falkone et le danseur hip hop Miguel Nosibor pour accompagner le slammeur.

Une création faite d’alliances inattendues et de mélanges des genres, qui se termine avec l’ombre d’Albert Camus flottant sur le rideau rouge, et sa voix résonnant dans le théâtre : « l'art et la révolte ne mourront qu'avec le dernier des hommes ». La preuve que certaines problématiques sont universelles, et avant tout que l’art est intemporel.

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