Le 26 février, le Philharmonique de New York, dirigé par Lorin Maazel, donnait un concert historique dans la capitale nord-coréenne sur fond de guerre virtuelle.

Dvorak, Wagner et Gershwin et les hymnes nord-coréen et américain étaient au programme du concert historique donné mardi 26 février, à Pyongyang, par l'Orchestre Philharmonique de New York, sur fond de négociations sur le démantèlement du programme nucléaire du régime communiste.

Arrivé lundi dans l'un des pays les plus fermés au monde, l’AFP raconte que la phalange, dirigée par Lorin Maazel, a débuté le concert par l'interprétation des hymnes nationaux devant 1.500 invités dans le Grand Théâtre de Pyongyang.

« Mes collègues de l'Orchestre philharmonique de New York et moi-même sommes heureux de jouer aujourd'hui dans cette belle salle », a déclaré Maazel au public, auquel il a souhaité en coréen un « bon concert » avant d'entamer la Neuvième Symphonie de Dvorak. Durant un concert de plus d'une heure et demie, retransmis en Corée du Nord et dans le monde entier, le célèbre orchestre et ses 106 membres ont ensuite interprété le Prélude de l'Acte III de Lohengrin de Wagner et Un Américain à Paris de Gershwin.

Le concert s'est terminé par l'interprétation de Arirang, une chanson folklorique coréenne, qui exprime toute la mélancolie de la séparation entre des amoureux. Il a été suivi d'une longue ovation du public.

Cette représentation constituait une première, alors qu'Etats-Unis et Corée du Nord sont toujours virtuellement en guerre, faute d'avoir conclu un traité de paix après la guerre de Corée (1950-1953), et alors que les deux pays sont engagés dans une délicate négociation sur le démantèlement du nucléaire nord-coréen. Aucun haut responsable américain n'assistait à la représentation, mais la dimension politique du concert était évidente.

« C'est une petite porte ouverte par le gouvernement nord-coréen, qui pensait qu'il était temps qu'une porte s'entrouvre », a déclaré Lorin Maazel à l'AFP avant le concert. Le chef d'orchestre a confirmé que la décision de se produire en Corée du Nord avait été longuement discutée par les responsables de l'orchestre, en relation avec le principal négociateur américain avec Pyongyang, le secrétaire d'Etat adjoint aux Affaires asiatiques, Christopher Hill, qui l'a finalement approuvée.

« Monsieur Hill a pensé que montrer cette facette de notre culture occidentale à Pyongyang pourrait permettre d'améliorer l'atmosphère des négociations, sans garantie », a indiqué le directeur de l'orchestre, Zarin Mehta. « Je crois profondément que les hommes doivent communiquer entre eux. Nous communiquons à travers la grande musique », avait déclaré lundi soir à l'AFP Paul Guenther, président du Philharmonique de New York.

Toujours selon l’AFP, ce concert représente un échange culturel sans précédent entre les Etats-Unis et la Corée du Nord, qui avaient placé le régime communiste sur leur « axe du mal ». Il intervient un an après la conclusion d'un accord à six (Corée du Nord, Corée du Sud, Etats-Unis, Chine, Russie et Japon) qui prévoit le démantèlement des installations nucléaires nord-coréennes en échange d'une aide énergétique d'un million de tonnes équivalent-pétrole. Mais l'application de cet accord a connu des ratés ces dernières semaines. Les Etats-Unis accusent le régime communiste de poursuivre un programme secret d'enrichissement d'uranium, alors que la Corée du Nord se plaint de ne pas avoir reçu toute l'aide promise. La secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice, en tournée dans la région, a appelé la Chine, mardi à Pékin, à « user de son influence » pour convaincre les Nord-Coréens d'avancer dans le démantèlement de leur programme d'armement nucléaire. « Nous attendons de la Corée du Nord qu'elle respecte ses engagements et (attendons) une déclaration complète de ses programmes nucléaires », a répété Mme Rice.